RDC-Rwanda: plusieurs officiers visés par les sanctions de l’Union Européenne

En avant-plan, Sulutani Makenga, le chef de la branche armée de la rébellion du M23 à Goma le 20 novembre 2012


L’Union européenne planche sur une nouvelle liste de sanctions à l’initiative de plusieurs Etats membres de l’UE. Des discussions sont en cours à Bruxelles pour imposer de nouvelles sanctions à l’encontre de responsables de l’armée congolaise. Fait inédit, la liste proposée comporte également le nom d’un officier rwandais, accusé d’œuvrer auprès des rebelles du M23 dans la province du Nord-Kivu.

L’Union européenne (UE) pourrait adopter un nouveau train de sanctions contre des responsables des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC). Une liste en ce sens a été préparée conjointement par plusieurs Etats membres, en l’occurrence, les Pays-Bas, la Belgique et l’Allemagne. Les noms qui y figurent demeurent sujets à caution, mais sont liés aux différents conflits en cours dans l’est de la RDC. C’est le cas notamment de la guerre menée par les FARDC contre le M23, un mouvement rebelle soutenu en sous-main par Kigali, comme l’ont documenté les Nations unies (AI du 18/06/23).

En décembre 2022, l’UE avait déjà placé sous sanctions huit responsables de groupes armés, dont le porte-parole du M23, Willy Ngoma, mais aussi Ruvugayimikore Protogène, l’un des chefs des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), un mouvement constitué à l’origine d’anciens génocidaires hutus et particulièrement dans le viseur de Kigali – et sur lequel s’appuient régulièrement les FARDC contre le M23. En visant ces deux mouvements hostiles l’un à l’autre, Bruxelles cherchait à les renvoyer dos à dos, en mettant en exergue leurs exactions contre les civils.

L’officier « Gasasira » dans la liste

Chose inédite, la liste proposée à l’UE, qui doit encore recueillir l’assentiment de l’ensemble des Etats membres, comporte le nom d’un officier issu des rangs des Rwanda Defence Forces (RDF). Selon nos informations, il s’agit du capitaine Jean-Pierre Niragire. Aussi connu sous l’alias « Gasasira », son nom figure dans le dernier rapport du groupe d’experts des Nations unies. Il y est présenté comme étant à la tête des troupes RDF, notamment des forces spéciales, déployées à partir de mai 2022 pour des opérations spécifiques dans la province du Nord-Kivu.

La présence sur cette liste de « Gasasira » peut étonner, l’officier en question étant de rang modeste : il reçoit lui-même des instructions du général de division Ruki Karusisi. Il s’agit surtout pour l’UE de signifier au régime de Paul Kagame la condamnation de son soutien au M23, et de faire suite aux différents rapports du groupe d’experts qui ont documenté l’appui décisif des RDF aux rebelles.

Discussions à Bruxelles
La proposition de ces nouvelles sanctions a été discutée à l’occasion d’une réunion début juillet du groupe de travail sur l’Afrique (COAFR), une instance relevant du Conseil européen. Si elle semble rencontrer peu de résistance de la part des autres pays membres, notamment de la France, cette liste a été diversement appréciée par les représentants du Service européen pour l’action extérieure (SEAE). En coulisses, ces derniers s’interrogent sur l’absence de prise de position, voire de sanctions, à l’égard des sociétés militaires privées détenues par des ressortissants européens qui prêtent main-forte aux FARDC dans leur lutte contre le M23 (AI du 06/01/23).

Au cours de la réunion, le SEAE a également questionné l’opportunité de poursuivre le soutien de Bruxelles au programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation (PDDRCS), alors que le financement européen prévu à cet effet est de seulement 7 millions d’euros – un montant jugé dérisoire qu’ils proposent plutôt d’allouer à l’accueil des réfugiés au Rwanda. Face à l’opposition des Etats membres, ainsi que de la RDC, le SEAE a finalement fait marche arrière.

La diplomatie européenne, incarnée par son haut représentant pour les affaires étrangères et la politique de sécurité Josep Borrell, est régulièrement soupçonnée d’être sur une ligne pro-Kigali. Cela n’a toutefois pas empêché l’UE de publier le 7 juillet dernier un communiqué condamnant explicitement le soutien de Kigali au M23.

DPN

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