Homélie prononcée à l’occasion de la messe de clôture de la 31e Semaine des Intellectuels et Cadres Dirigeants Catholiques de Kinshasa par l’abbé José Mpundu (Quelques témoignages)

16e dimanche du temps ordinaire A

Textes : Sg 12, 13.16-19 ; Ps 85, Rm 8, 26-27 ; Mt 13, 24-43

Aujourd’hui comme hier, nous entendons dire que le pays va mal, même très mal disent certains. Il nous arrive à nous-même, à chacun de nous ici présent de le dire sinon de le penser. Au terme de notre 31e Semaine des Intellectuels et Cadres Dirigeants Catholiques de Kinshasa, le Seigneur nous invite à méditer sur la question du mal. D’où vient le mal ? Que faire face au mal qui se déploie dans le cœur de l’homme qui est le champ du Seigneur ?  

Dimanche passé, il a été question de la parabole du semeur. Ce semeur, c’est Dieu. La semence, c’est sa parole de vie, parole de vérité et parole d’amour. Le terrain ensemencé c’est le cœur de chacun de nous. Cette parole de Dieu peut tomber soit sur le bord du chemin, soit sur le sol pierreux, soit dans les ronces, soit enfin dans la bonne terre. Chacun de nous se retrouve dans l’une ou l’autre catégorie selon les circonstances de la vie et nos choix du moment. 

Aujourd’hui, il ne s’agit plus d’un seul semeur mais de deux. L’un qui sème le bon grain et l’autre qui sème l’ivraie. Le premier, celui qui sème le bon grain, c’est évidemment Dieu, ce Dieu qui est Amour. Il sème l’amour dans nos cœurs. Il travaille au grand jour. Le second, celui qui sème l’ivraie, c’est l’ennemi de Dieu, le Diable. Il travaille la nuit, dans le noir, dans l’obscurité, lorsque les gens dorment, sont distraits. 

Ce que le traducteur appelle « l’ivraie », en grec, c’est « zizanion », qui a donné l’expression « semer la zizanie, la discorde ». Voilà le travail de l’ennemi de Dieu : là où Dieu sème l’entente, la concorde, lui met la discorde. Cela correspond vraiment à la traduction du mot Diable qui signifie le « commun diviseur ». 

Nous avons ici la réponse à la première question de notre méditation de ce matin : d’où vient le mal ? Cela doit être clair dans nos esprits : le mal ne vient pas de Dieu mais de l’ennemi de Dieu. Et qui est l’ennemi de Dieu ? Tout celui qui ne fait pas la volonté de Dieu. L’ennemi de Dieu, c’est moi, c’est toi, c’est lui, c’est chacun et chacune de nous, dans la mesure où nous n’accomplissons pas la volonté de Dieu dans nos vies. 

Bref, le mal vient de l’homme et non de Dieu. Le mal vient du cœur de l’homme lorsque ce cœur se détourne de Dieu et de sa volonté qui est et qui restera toujours une volonté d’amour. Ce qui est beau, ce qui est bien et ce qui est vrai c’est ça la volonté de Dieu.

Prenons donc conscience de la participation de chacun et chacune de nous à la propagation du mal dans notre monde, dans notre société, dans notre pays ! Chacun de nous doit pouvoir dire : je suis responsable, pour ma part, du mal qui ronge notre société. C’est la responsabilité individuelle, personnelle qu’il ne faut pas ignorer. 

Ensemble, nous devons nous dire : nous sommes responsables des maux qui minent notre société. C’est la responsabilité collective. Bien entendu, cette responsabilité collective ne doit exclure la responsabilité personnelle. Nous ne devons pas nous cacher derrière la responsabilité collective pour minimiser notre responsabilité personnelle ou carrément la nier. 

Bien qu’aujourd’hui, le mal se commet en plein jour ; il nous faut admettre que le malfaiteur que chacun de nous est, à différents degrés, le malfaiteur fait tout pour ne pas être attrapé. Il crée la distraction pour ne pas être attrapé ou alors il agit dans le noir, dans l’obscurité pour ne pas être reconnu. 

Faisons donc attention à la distraction ! Ne nous laissons pas distraire et ne distrayons pas les autres ! Congolais, nous vivons beaucoup dans la distraction ! Nous sommes distraits par les terrasses, par les Eglises du réveil ou du sommeil, par la télévision, par les réseaux sociaux, par le théâtre, par la musique, par de tas d’activités dites de détente, etc. Sortons de la distraction ! 

Le mal et le bien coexistent dans le monde, dans la société, dans l’homme. C’est le moment ici de dire que la frontière entre le mal et le bien ne passe entre les hommes pour les diviser en deux camps : le camp de bons d’un côté et le camp des mauvais de l’autre. Non mes amis ! La frontière entre le bien et le mal passe par le cœur de l’homme. C’est dans le cœur de l’homme qu’il y a le bon grain et l’ivraie. En chacun et chacune de nous, il y a du bon et il y a du mauvais. Cette prise de conscience de la coexistence du bien et du mal dans nos vies, dans nos cœurs, est fondamentale pour lutter contre la propagation du mal et pour la croissance du bien. 

Ceux qui vont demander au propriétaire du champ, l’autorisation d’arracher l’ivraie semée par l’ennemi la nuit, ne s’attendent pas à la réponse et à la réaction du Seigneur. Ecoutons encore une fois la réponse du Seigneur : « Non, en enlevant l’ivraie, vous risquer d’arracher le blé en même temps. Laissez-les pousser ensemble jusqu’à la moisson ; et, au temps d la moisson, je dirai aux moissonneurs : Enlevez d’abord l’ivraie, liez-la en bottes pour la brûler ; quant au blé, ramassez-le pour le rentrer dans mon grenier » (Mt 13, 29-30). 

Cette réponse est surprenante et peut créer la confusion en nous. Ne devrions-nous donc pas déraciner le mal ? Dieu serait-il là en train d’encourager le laisser-aller, le laisser-faire ? Non. Il ne s’agit pas de cela. Jésus veut nous apprendre qu’il n’y a que Dieu qui peut déraciner le mal en chacun de nous et dans le monde. Le temps viendra où il faudra arracher l’ivraie, le mauvais grain. Ce temps de la moisson n’appartient qu’à Dieu seul. 

Le Seigneur nous invite ici à faire preuve de patience et d’humilité. Une patience qui n’est pas synonyme de passivité. Il faut, patiemment, coopérer au lent travail de Dieu, en lui faisant confiance. Il nous faut une grande bonté. Il nous faut respecter les pécheurs, les méchants – que nous sommes chacun de nous – pour la part de bien qui est en eux, en chacun de nous. 

La patience de Dieu, c’est cette façon d’agir qui laisse le temps au pécheur que nous sommes, de nous convertir. Il s’agit ici d’apprendre à ne pas voir que l’ivraie c’est-à-dire ce qui a de mauvais chez les autres et en nousmêmes. Il nous faut nous habituer à voir le « bon » qui est dans l’humanité de chacun et chacune de nous. 

Dans tout cela, il nous faut quitter nos attitudes pharisaïques qui nous font regarder les autres du haut de notre prétendue grandeur spirituelle. Il nous faut donc beaucoup d’humilité qui nous pousse à nous reconnaître pécheurs comme les autres. Cette humilité qui nous aidera à ne pas nous comporter en juge président des autres, en donneur de leçons oubliant que nous avons tous à nous laisser interpeller par la Parole de Dieu. 

Que devons-nous faire alors concrètement face au mal qui se déploie dans le monde par l’agir des hommes ? 

Nous devons semer la graine de moutarde qui est en chacun de nous. Une graine. Cette graine, la plus petite, presqu’invisible, est déposée dans le creux de ta main, de ma main. Cette graine, si nous la semons et que nous avons la patience d’attendre, en la soignant, en l’arrosant, finira par grandir et par faire du bien. Le long terme. Voilà ce à quoi cette parabole de la graine nous invite. Elle nous invite à faire une grande confiance en la puissance de Dieu qui agit à travers des petites choses, insignifiantes parfois. Rêvons avec Dieu de ce grand arbre où les oiseaux viendront faire leurs nids dans ses branches ! Rêvons avec Dieu d’un nouveau Congo, d’un grand Congo où il fera bon vivre pour tout le monde ! 

Comme la maman qui prépare les beignets, mettons une pincée de levure minuscule dans une grande quantité de farine. La levure va disparaître dans la farine et faire lever la pâte. Ce levain que nous devons mettre dans la farine du monde c’est l’évangile. Toi et moi, frères et sœurs, nous devons nous laisser transformer pour devenir « levain » qui va être enfoui dans le monde, devenant une force invisible de vie pour un nouveau monde, pour un nouveau Congo. 

C’est cette force de Dieu qui est à l’origine de la justice-miséricorde. Comme nous l’avons entendu dans l’extrait du livre de la Sagesse qui nous a été lu en première lecture : « Toi qui disposes de la force, tu juges avec indulgence, tu nous gouvernes avec beaucoup de ménagement, car tu n’as qu’à vouloir pour exercer ta puissance. Par ton exemple tu as enseigné à ton peuple que le juste doit être humain ; à tes fils tu as donné une belle espérance : après la faute tu accordes la conversion » (Sg 12, 18-19). Le juste doit être humain et donc la justice doit être humaine, humaniste. Après la faute, Dieu nous donne le temps de la conversion. 

Je voudrais terminer cette méditation de la Parole en reprenant l’explication que Jésus lui-même de la parole du bon grain et de l’ivraie. « Celui qui sème le bon grain, c’est le Fils de l’homme ; le champ, c’est le monde ; le bon grain, ce sont les fils du Royaume ; l’ivraie, ce sont les fils du Mauvais. L’ennemi qui l’a semée, c’est le diable ; la moisson, c’est la fin du monde ; les moissonneurs, ce sont les anges. De même que l’on enlève l’ivraie pour la jeter au feu, ainsi en sera-t-il à la fin du monde. Le Fils de l’homme enverra ses anges, et ils enlèveront de son Royaume toutes les causes de chute et ceux qui font le mal ; ils le jetteront dans la fournaise : là, il y aura des pleurs et des grincements de dents. Alors les justes resplendiront comme le soleil dans le Royaume de leur Père » (Mt 13, 37-43).  

Celui qui a des oreilles pour entendre qu’il entende ! Amen !

Témoignages sur l’auteur par certains intellectuels

Lors de la célébration du 45e anniversaire de sacerdoce de l’abbé José Mpundu, le dimanche 9 juillet dernier à la paroisse St Michel de Bandalungwa, certains intellectuels sont revenus sur cette figure emblématique de la vie soci-ecclésiastique de la République démocratique du Congo. Il s’agit de Messieurs Modeste Mbonigaba et le sénateur Didier Mumengi, deux intellectuels reconnus.

L’homme d’une autre génération selon Modeste Mbonigaba

Un modèle de dévouement pour la nation selon le sénateur Didier Mumengi

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