LES CONGOLAIS DANS LA GUERRE EN UKRAINE(Par Musene Santini Be-Lasayon

Dans la guerre pour l’hégémonie géopolitique qui déchire actuellement le monde, par l’Ukraine interposée, la place des Congolais n’est ni derrière la Russie de Vladimir Poutine, la deuxième puissance militaire mondiale, ni derrière l’Occident mené par les Etats-Unis d’Amérique de Joe Biden, la première puissance mondiale dans tous les secteurs majeurs d’activités, ni derrière la Chine de Xi Jinping, la deuxième puissance économique mondiale, mais bien plutôt aux côtés des Congolais et sur le sol congolais. En effet, cette guerre-là n’est pas tout-à-fait la guerre des Congolais. Elle est plutôt, foncièrement, la guerre des monstres froids habitués à diviser et à écraser les faibles. Si les Congolais veulent vraiment mettre fin à leur propre guerre, s’ils aiment sincèrement leur pays et s’ils tiennent réellement à le construire en profondeur, ils ne doivent compter ni sur les Russes, ni sur les Occidentaux, ni sur les Chinois, mais bien plutôt sur eux-mêmes.

Face à la guerre pour l’hégémonie géopolitique mondiale que se livrent, par l’Ukraine interposée, la Russie de Vladimir Poutine et l’Occident conduit par les Etats-Unis d’Amérique de Joe Biden, les Congolais sont divisés en trois camps distincts, séparés et opposés. Il s’agit des camps ci-après: pro-Poutine ou Pro-Russie, pro-Occident et pro-Congo. Décortiquons, ensemble, chacun de ces trois groupes.

Pro-Poutine

Le premier groupe, le plus bruyant, le plus grouillant et probablement le plus large de tous, c’est celui des pro-Poutine ou des pro-Russie. Il se constitue des fanatiques et autres inconditionnels de Vladimir Poutine, l’incarnation et le visage de la Russie post-soviétique. Ces derniers donnent l’impression de vénérer cet homme. Tout simplement parce qu’il défie courageusement, par sa guerre en Ukraine, le géant américain et l’Union Européenne, les détenteurs incontestés, incontestables et incontournables de l’hégémonie géopolitique unipolaire depuis 1945, et réclame, à cor et à cri, l’hégémonie géopolitique mondiale  multipolaire et partagée.

Ce groupe qualifie l’Occident d’hypocrite, d’injuste et de méchant à l’égard de la RD-Congo. Il reproche à l’Occident, qui se fait pourtant passer pour le garant de la paix mondiale, de soutenir massivement, et sur tous les plans, l’Ukraine de Volodimir Zelensky contre la Russie de Vladimir Poutine. En effet, pour rappel, la Russie, la deuxième puissance militaire mondiale après les Etats-Unis d’Amérique, a envahi et occupe, depuis le 24 février 2022, une bonne partie de l’Ukraine, un pays pourtant modeste et faible. Cependant, ce même Occident a quasi-abandonné, depuis plus de 25 ans, la RD-Congo qui subit incessament, dans sa partie Est, les attaques et les invasions injustifiées du Rwanda voisin. Pire, incroyable, mais pourtant vrai, ce même Occident appuie sournoisement l’assaillant et l’envahisseur rwandais contre la RD-Congo.

Face à cette politique absurde de deux poids, deux mesures de l’Occident, ce groupe prend clairement et nettement position en faveur de Vladimir Poutine et de sa Russie, l’assaillant et l’envahisseur de l’Ukraine. Il pousse même le gouvernement central rd-congolais à s’allier à la Russie de Vladimir Poutine afin de libérer l’Est du pays du joug rwandais et, par ricochet, occidental. Car, il croit que la promotion et la défense des intérêts majeurs du pays passe nécessairement, aujourd’hui, par l’alliance avec la Russie de Poutine. Pour ce groupe, contrairement à l’Occident, la Russie de Poutine est susceptible d’accompagner la RD-Congo dans ses efforts pour le développement intégral, intégré et durable.

Pro-Occident

Le deuxième groupe des Congolais, qui intervient dans ce débat sur la présente guerre pour l’hégémonie géopolitique mondiale, paraît moins bruyant, moins grouillant et certainement moins large que le premier. Comme le groupe précédent, il condamne avec force le comportement ambigü de l’Occident envers la RD-Congo relativement aux attaques  et invasions injustifiées du Rwanda. Il pense, cependant, qu’il est logique, normal et juste que l’Occident assiste massivement l’Ukraine dans la guerre injuste et injustifiée que la Russie de Vladimir Poutine, la deuxième puissance militaire mondiale après les Etats-Unis d’Amérique, impose à son modeste et faible voisin.

Ce groupe, dit pro-Occident, prend discrètement et timidement position pour l’Occident et l’Ukraine de Volodimir Zelensky contre la Russie de Vladimir Poutine. Il qualifie celui-ci de fruste, de brutal et de criminel. Il considère la Fédération de Russie, économiquement faible par rapport à l’Occident, comme étant incapable d’aider sérieusement la RD-Congo qui fait face à de multiples, d’innombrables et d’immenses problèmes embrouillés.  

Il croit, enfin, en la capacité de l’Occident, qui connaît de loin mieux la RD-Congo que la Russie, de s’amender et d’apporter à la RD-Congo l’assistance dont elle a grandement besoin pour son développement intégral, intégré et durable.

Pro-Congo

Le troisième et dernier groupe des Congolais, auquel je me rattache en tant que l’un de ses intellectuels organiques, est qualifié de pro-Congo. Composé de toutes sortes de gens qui évitent ou refusent les bruits inutiles, il est généralement invisible. Comme les deux premiers groupes, il désapprouve le comportement hypocrite et ambigü de l’Occident vis-à-vis de la RD-Congo. Mais, il est très critique à l’égard et de la Russie de Vladimir Poutine et de l’Occident conduit par les Etats-Unis d’Amérique de Joe Biden. Il n’accorde, en réalité, aucun crédit et ne fait nullement confiance ni à l’Occident, ni à la Russie, ni encore moins à leurs promesses dont la plupart sont fallacieuses. Il est donc simultanément contre la Russie de Vladimir Poutine et contre l’Occident de Joe Biden. Ses arguments ?

L’Occident a colonisé tous les pays d’Afrique, y compris l’Ethiopie et le Libéria. Il a colonisé tous les pays d’Océanie, tous les pays d’Amérique latine, des Antilles et des Caraïbes et une bonne partie des pays d’Asie. Et ce, pendant plusieurs siècles ou décennies. Partout, il s’est comporté et se comporte encore et toujours en maître. Il a politiquement, économiquement, socialement et culturellement dominé, exploité et ruiné tous ces pays. Actuellement, l’écrasante majorité de ces pays le boudent, sans pour autant l’abandonner. Mais, ces pays demeurent, généralement, pauvres et sous-développés. Les seules colonies de l’Occident qui se sont réellement émancipées et qui se retrouvent aujourd’hui parmi les pays les plus hautement développés sont des anciennes colonies britanniques de peuplement. C’est-à-dire, des colonies que les Britanniques avaient transformées en leurs propres homelands. Je cite, ici, les Etats-Unis d’Amérique, le Canada, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et, dans une moindre mesure, la République Sud-Africaine.

La Russie, qu’elle soit tsariste ou soviétique, a politiquement, économiquement, socialement et culturellement colonisé, dominé, exploité et ruiné tous les pays de l’Europe de l’Est et la quasi-totalité des pays de l’Europe centrale. Au bout du compte, aucun de ces pays n’a pris l’envol en matière de développement. Ils croupissent généralement dans la pauvreté, la misère et le sous-développement. Conséquences inéluctables: l’URSS et l’empire russo-soviétique se sont disloqués. La plupart des anciennes républiques soviétiques sont redevenues des pays souverains, indépendants et libres. Les ex démocraties populaires, jadis pays satellites de l’URSS, sont devenus plus souverains, plus indépendants et plus libres que jamais auparavant. Et les anciennes républiques soviétiques et les ex démocraties populaires ont, dans leur écrasante majorité, abandonné la Russie de Poutine. D’où, la disparition du Pacte de Varsovie et du Comecon qui les reliaient entre eux sur les plans respectivement militaire et économique.

Sous le couvert de l’URSS, la Russie, la seule et l’unique puissance de ce conglomérat de pays qui se sont finalement avérés tout simplement juxtaposés, avait la main mise sur certains pays d’Afrique, tel que la Guinée Conakry de Sekou Touré ; sur quelques pays d’Amérique latine, des Antilles et des Caraïbes, comme Cuba de Fidel Castro ; et sur des pays d’Asie, à l’instar du Vietnam de Hô Chi Minh et du Cambodge des Kmers Rouges de Pol Pot. Et ce, en appui fondamental à la Chine de Mao Tsé Toung, alors la seule et l’unique puissance régionale. Mais, aucun de ces divers pays n’est sorti du sous-développement. Au contraire, ils ont beaucoup regressé.

Aux yeux de ce troisième et dernier groupe des Congolais qui participent au débat sur l’actuelle guerre pour l’hégémonie géopolitique mondiale, il n’y a point, entre l’Occident, la Russie et la Chine, de moindre mal. A ce sujet, il exhibe le cas des contrats chinois, signés en avril 2008 avec le gouvernement central congolais, par lesquels les Chinois ont, selon l’IGF, roulé les Congolais. Car, ils ont beaucoup plus gagné, et ce très loin, que le gouvernement congolais. Ce groupe cite, par ailleurs, le cas des 16 Chinois de la société minière Xing Jiang Mining qui viennent d’être arrêtés pour exploitation illicite et illégale des minerais congolais dans le territoire de Basoko, dans la province de la Tshopo.

D’après ce troisième et dernier groupe, l’Occident, la Russie et la Chine sont, tous indistinctement, des monstres froids. Ils ne s’occupent sérieusement, profondément et beacoup plus que de leurs propres intérêts que de ceux des pays avec lesquels ils font semblant de coopérer. Ils sont, tous indistinctement, des hypocrites, des « kuluna » en cravate, des exploiteurs insoucieux de leurs esclaves, des expansionnistes autoritaires et des impérialistes sans vergogne. Ils ont, tous indistinctement, polititiquement, économiquement, socialement et culturellement exploité et ruiné les pays faibles. En effet, aucun pays d’Afrique, d’Asie, d’Océanie, d’Amérique latine, des Antilles et des Caraïbes ne s’est jamais développé et ne se développera  grâce à la Chine, à l’Occident ou à la Russie. La Chine. l’Inde et le Brésil, qui sont aujourd’hui parmi les cinq principales puissances émergentes, y sont parvenus par leurs propres efforts. Où voudrions-nous en arriver ?

Compter sur soi-même

On l’a assurément remarqué et compris. Le troisième et dernier groupe des Congolais, qui débattent sur la guerre pour l’hégémonie géopolitique unipolaire ou multipolaire qui déchire présentement le monde, par l’Ukraine interposée, est totalement et fondamentalement pro-Congo. Il dit, sans ambages, aux Congolais que cette guerre d’Ukraine n’est pas, dans le fond, la guerre des Congolais.  Elle est plutôt, foncièrement, la guerre des monstres froids habitués à diviser et à écraser les faibles, dont les Congolais. C’est donc la guerre des bourreaux des faibles. De ce  fait, dans cette guerre, la place des Congolais n’est ni derrière les Occidentaux, ni derrière les Chinois, ni derrière les Russes, mais bien plutôt aux côtés des Congolais et sur le sol congolais.

En définitive, si les Congolais aiment sincèrement leur pays, s’ils tiennent réellement à mettre fin à leur propre guerre, celle de l’Est leur imposée par le Rwanda et s’ils veulent vraiment construire en profondeur leur pays, ils ne doivent compter ni sur les Occidentaux, ni sur les Chinois, ni sur les Russes, mais bien plutôt, fondamentalement, sur eux-mêmes. Les Chinois, les Indiens et les Brésiliens, qui se trouvent aujourd’hui parmi les cinq puissances émergentes, sont passés par là. Tout en continuant à coopérer avec le reste du monde, dont, malgrè tout, les incontournables Occidentaux, Chinois et Russes. En respectant scrupuleusement les clauses gagnant-gagnant des contrats signés avec leurs divers partenaires. Le développement intégral, intégré et durable de la RD-Congo est à ce prix et à ce prix seulement.

MUSENE SANTINI BE-LASAYON

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