« Jésus, donne-nous ta sainte imprudence »: Prière prononcée par l’abbé José Mpundu à l’occasion du 45e anniversaire de sa sacerdotale(vidéo intégralité de la messe)

L’abbé José Mpundu, prêtre de l’archidiocèse de Kinshasa a célébré ses 45 ans de vie sacerdotale le dimanche 9 juillet dans sa paroisse d’origine St Michel de Bandalungwa.

Entouré de ses confrères prêtres et devant une assistance hétéroclite composée des fidèles, membres de sa famille biologique et plusieurs amis dont le sénateur Didier Mumengi, l’intellectuel et analyste Modeste Mbonigaba, ses anciens collègues de promotion, le très engagé  » Ya José » a clôturé cette célébration eucharistique par une prière qui doit interpeller la nation congolaise toute entière dont voici la quintessence :

Seigneur Jésus, «Dieu-notre-justice », annoncé par le prophète Jérémie, pour ouvrir ton message de libération et de rédemption, tu ne t’es pas basé sur la religion établie du temple, mais tu es retourné aux prophètes, qui par leur parole pure et sans tâche, sans aucun compromis ni aucune contamination, ont annoncé au monde sa rédemption et donné espoir au peuple. La justice, réclamée aujourd’hui par les pauvres et les opprimés, Jésus, tes prophètes l’ont prêché depuis 3000 ans. Tu as accompli la parole des prophètes et tu l’as signée de ton sang. Tu as réalisé dans ton corps la bataille sanglante de la justice contre toutes les forces du mal.

Si les peuples, en lutte pour leur vie, n’ont pas entendu dans ton message l’annonce d’une vraie libération, c’est qu’on ne leur a pas montré ton vrai visage, Jésus, ni ton vrai message. On t’a montré trop souvent comme un Jésus mort dans un tabernacle-cercueil, symbole d’un éternel esclavage sans espoir. On ne t’a pas montré comme tu es, Jésus: guerrier, tout seul au champ de bataille contre le régime d’oppresseurs de Pilate, contre le régime de jouisseurs d’Hérode, contre le régime de complicité hypocrite de Caïphe.

On ne t’a pas montré, Jésus, caché dans ce tabernacle comme une source cachée dans le roc, que nous devons fendre comme Moïse, avec le bâton de notre courage, pour que ta source d’amour jaillisse sur tous les peuples, dans tous les déserts de la faim et de l’oppression.

Tu n’avais plus d’espoir de changer les cœurs corrompus des oppresseurs de ton temps. Tu n’as pas voulu entrer dans les cadres de leur pouvoir et de leur religion établie, de peur de troubler aux yeux des pauvres, la pureté de ton message. Tu n’as pas voulu appuyer ta mission sur aucun accommodement diplomatique avec les grands, de peur de voiler aux pauvres la vraie portée de ta Bonne Nouvelle. 

Et tu nous as dit, Jésus : « Comme le Père m’a envoyé, ainsi moi je vous envoie». Nous n’avons pas le droit aujourd’hui de vendre ton Evangile pour conserver la religion, nos écoles et nos sacrements. Une religion sans Evangile devient idolâtrie et paganisme. Elle devient l’instrument des puissants pour maintenir les peuples dans l’esclavage. 

Tu n’as pas eu, Jésus, la prudence que recommandent aux prêtres les autorités religieuses, civiles et militaires. Car cette prudence est, souvent transaction avec l’oppression, trahison de l’Evangile et maintien du «désordre établi ». Pour éviter l’expulsion des prêtres, on préfère l’expulsion de l’Evangile. Mais des prêtres sans 2

Evangile sont des prêtres des rites, des prêtres païens, faisant de leur peuple une proie docile entre les mains des oppresseurs. 

Tu n’as pas été, Jésus, un exemple d’obéissance aux autorités religieuses. Tu as été imprudent. Et tes missionnaires les plus courageux aujourd’hui n’oseraient pas répéter tes invectives contre les responsables hypocrites d’une religion des rites, qui maintient les grands au pouvoir et les pauvres dans la misère. Si tu avais eu un peu de prudence, Jésus, tu aurais pu sauver ta vie, mais pas la vie des pauvres. Une prudence pharisaïque peut sauver notre religion, nos sacrements et nos écoles, mais pas notre peuple, qui attend de nous sa rédemption. 

Seigneur Jésus, Jésus très imprudent, donne-nous de ta sainte imprudence qui est la seule vraie prudence: l’annonce de ton règne de justice, où les pauvres possèderont la terre, où les affligés seront consolés, les affamés de justice rassasiés, les opprimés et les prisonniers libérés. Notre seule imprudence comme chrétiens serait d’être infidèles à cette mission que tu nous as confiée.

Pendant ton procès devant Pilate, entouré de tes ennemis politiques et religieux, tu as dit que tu étais venu dans le monde pour témoigner de la vérité. Nous tes disciples, nous ne pouvons plus témoigner du mensonge. Nous ne pouvons pas prier à l’église et avoir peur de parler dehors, pour ne pas perdre la faveur des puissants et des installés, qui écrasent les pauvres. Ouvre les yeux de tous tes disciples, Jésus, comme tu l’as fait pour les disciples d’Emmaüs. Déçus de ce qui s’est « passé ces jours-ci » … comment nos chefs t’ont-ils livré de nouveau pour être crucifié dans la faim et l’esclavage sous toutes ses formes? Et comme les disciples d’Emmaüs, nous te prions, Jésus, « reste avec nous, car le soir approche ». Mets-toi à table avec nous pour rompre ton pain et nous donner ton corps; pas ton corps mort, mais ton corps vivant, pour que dans ton Eucharistie, nos pauvres trouvent la résurrection à une nouvelle vie.

Marie, notre Mère, avec ton Fils tu t’es engagée totalement pour établir son règne d’amour. Tu l’as suivi jusqu’au bout, jusqu’à participer toi-même à son sacrifice final. Nous sommes tes enfants. Sois notre soutien dans la mission que Jésus, ton Fils nous a confiée et que nous voulons, avec toi, accomplir jusqu’au bout. Amen. 

(Extrait du livre d’Albert DUMON, Si Jésus revenait cette nuit.., Commission Francophone Justice et Paix, Bruxelles, p. 90-102). 

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