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Théogène Rudasingwa à Kagame:  » va au diable »

Théogène Rudasingwa, secrétaire général du FPR en 1994, ancien ambassadeur du Rwanda aux États et ancien directeur de cabinet de Paul Kagame , adresse une lettre ouverte à ce dernier suite à son dernier discours. Dans cette lettre , il conclue en invitant le général Kagame à se retirer « pour le Rwanda.

Pour sa dignité.

Pour sa mémoire.

Pour sa paix. »

 

La lettre est intitulée « « Va au diable » : Un

Moment de Deuil Transformé en Théâtre de Folie »

 

Ci-dessous , la lettre complète

J’ai écouté nombre de vos discours au fil des décennies – certains que j’ai moi-même rédigés, d’autres que j’ai aidé à façonner dans des moments d’espoir, de triomphe et de mémoire solennelle. Je me suis tenu à vos côtés en tant que camarade soldat, ambassadeur, conseiller, rédacteur de discours et, pendant un temps, en tant que Chef de cabinet du Président. Mais jamais – même dans les heures les plus sombres de la reconstruction de notre nation – ne vous ai-je vu paraître aussi effrontément minable, aussi perturbé, aussi publiquement en proie à l’insécurité, que lors de votre récente déflagration lors de la 31ᵉ commémoration du génocide contre les Tutsi.

 

Je suis embarrassé, au nom de tout le peuple rwandais, que vous soyez qualifié de leader rwandais à un moment où la sagesse et le discernement devraient être les qualifications déterminantes pour diriger.

 

Avril est le mois où le Rwanda saigne à nouveau. C’est le moment où nous, en tant que peuple, nous rassemblons dans la tristesse et le souvenir pour évoquer l’horreur de 1994 – non pas pour retraumatiser ou instrumentaliser notre chagrin, mais pour affirmer notre humanité, pour nous réengager dans notre serment collectif : “Plus jamais”. C’est une période où le leadership devrait s’élever à sa plus haute vocation – réconforter, unir et guider une nation meurtrie vers la guérison et la paix. Mais au lieu de mener votre peuple dans le deuil, au lieu de panser les plaies des survivants et d’invoquer l’humilité qu’une telle journée exige, vous avez pris la parole et déclaré la guerre : non pas contre ceux qui planifient ou nient le génocide, mais contre vos détracteurs, vos anciens alliés et l’ensemble même de la communauté internationale qui a choyé, défendu et permis votre règne pendant près de trente ans.

 

« Va au diable, » avez-vous craché au visage de l’Occident – non pas une fois, mais tel un mantra. Vous avez incité les Rwandais à « se préparer à la guerre, » à choisir la mort plutôt que la dignité, à mourir en se battant au lieu de « mourir comme des mouches. » Vous avez souillé la mémoire des morts dans votre colère et fait des vivants votre bouclier. Vous avez transformé notre espace sacré de mémoire en un théâtre de propagation de la frayeur et de défiance. Ce n’était pas la voix d’un homme d’État. Ce n’était pas la voix d’un leader ancré dans la vérité ou la force. C’était la voix d’un homme qui se désagrège, acculé par ses propres démons, terrifié à l’idée de faire face à son destin.

 

Permettez-moi, Monsieur le Général Kagame, de parler franchement. Vous avez ruiné la moindre once de mandat moral pour gouverner cette nation meurtrie. Le Rwanda n’est pas votre propriété. Sa douleur n’est pas votre arme. Le génocide ne vous appartient pas. Vous n’en avez jamais été ni le seul survivant, ni son unique gardien.

 

Pour diriger une nation meurtrie par des atrocités, vous devez être un guérisseur blessé qui ose reconnaître la souffrance de toutes parts, celui qui favorise la vérité, non la peur ; la justice, non la vengeance ; la réconciliation, non le déni – la paix avec les voisins, non la guerre et le pillage.

 

Un vrai leader ne met pas les survivants en guerre avec le monde entier ni les citoyens en conflit avec des ennemis imaginaires. Un vrai leader ne dit pas à son peuple que la mort est leur meilleur destin. Le Rwanda mérite mieux que d’être traité comme de la chair à canon dans votre lutte pour la survie politique et le pillage d’autres nations africaines. Notre jeunesse mérite mieux qu’un récit de guerre sans fin. Ils méritent un avenir fondé sur la paix et non sur la paranoïa.

 

Le Rwanda a besoin d’un chemin à suivre où la mémoire est honorée avec dignité, et non déformée pour faire des drames. Un chemin où nous nous reccueillons ensemble, reconnaissant la douleur infligée par les Rwandais aux Rwandais. Un chemin où nous marchons ensemble dans la justice réparatrice, la guérison et la recherche de la vérité. Un chemin où nous bâtissons des ponts de paix avec nos voisins, et non en les brûlant dans des rhétoriques enflammées.

 

Vous avez choisi la peur plutôt que la foi, la folie plutôt que la réflexion. Ce faisant, vous avez révélé que vous ne portez plus l’autorité spirituelle, la boussole morale ou la sobriété émotionnelle nécessaires pour guider cette nation. Le Rwanda est désormais un État sans homme d’État, un peuple forcé de pleurer sous l’ombre d’un homme qui confond le pouvoir avec la sagesse et la loyauté avec le silence.

 

Les Rwandais ne resteront pas silencieux. Pas face à une telle trahison. Les âmes que nous commémorons en avril exigent la vérité. Et les vivants qui subsistent méritent un avenir affranchi de votre terreur.

 

Retirez-vous Monsieur le Général Kagame, non pas pour l’Occident, non pas pour vos détracteurs, mais pour le Rwanda.

Pour sa dignité. Pour sa guérison. Pour sa paix.

 

Dr. Theogene Rudasingwa
Washington D.C. États-Unis
10 avril 2025
E-mail : [email protected]

 

Tiré de Echos d’Afrique.com
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