En ce 6 avril, la République démocratique du Congo rend hommage à Simon Kimbangu, figure majeure de la résistance spirituelle et politique contre le colonialisme. Grâce à l’ordonnance présidentielle du chef de l’Etat Félix Tshisekedi, cette date est désormais un jour férié consacré à la mémoire de celui que beaucoup considèrent comme le prophète des Noirs. Retour sur le parcours exceptionnel de cet homme ordinaire devenu symbole de justice et de conscience africaine.
Simon Kimbangu est né le 12 septembre 1887 à Nkamba, dans l’actuel Kongo Central. D’abord un homme simple, père de famille, il est baptisé en 1915 par la Baptist Missionary Society et formé comme catéchiste. En 1919, il tente sa chance à Léopoldville (Kinshasa) pour trouver du travail, en vain. Mais derrière cette trajectoire modeste se cache un destin exceptionnel. Le 6 avril 1921, dans un contexte colonial brutal où les voix africaines étaient systématiquement étouffées, il lance un mouvement spirituel révolutionnaire. Il affirme avoir reçu une vision de Jésus-Christ et accomplit une guérison miraculeuse sur une femme nommée Nkia Ntondo, événement qui attire des foules à Nkamba, désormais désignée comme la « Nouvelle Jérusalem ».
Un combat spirituel et anticolonial
Très vite, Simon Kimbangu devient une figure dérangeante pour les autorités belges. Les guérisons, les prêches et les rassemblements massifs inquiètent l’administration coloniale, qui y voit un ferment de révolte. Une enquête pour sédition est ouverte, et après avoir fui brièvement, Kimbangu se rend volontairement le 11 septembre 1921. Condamné à mort par un tribunal militaire, sa peine est commuée en prison à perpétuité. Il passera les 30 dernières années de sa vie incarcéré à Élisabethville (Lubumbashi), jusqu’à sa mort le 12 octobre 1951. Sa célèbre phrase: « Les blancs deviendront noirs et les noirs deviendront blancs », reste un symbole puissant de la lutte contre l’oppression et pour la décolonisation.
L’Esprit Kimbangu, un héritage vivant
Le message de Simon Kimbangu dépasse le cadre religieux : il incarne une conscience noire et africaine. Sa vision d’un monde plus juste, où les Africains reprennent leur dignité et leur spiritualité, continue d’inspirer des millions de fidèles. Après des décennies de clandestinité et de persécutions, son mouvement devient officiellement l’Église de Jésus-Christ sur la Terre par son envoyé spécial Simon Kimbangu en 1959. En 1969, elle est la première Église noire à rejoindre le Conseil œcuménique des Églises.
Son héritage ne cesse de grandir, transformant la foi en outil de résistance, de cohésion et d’émancipation.
Le 6 avril : un jour pour la mémoire et l’action
Par l’ordonnance présidentielle n° 23/042 du 30 mars 2023, le Président Félix-Antoine Tshisekedi a proclamé le 6 avril jour férié légal en République démocratique du Congo, en hommage au combat de Simon Kimbangu et à l’éveil de la conscience africaine. Ce geste symbolique invite chaque Congolais à redécouvrir l’Esprit Kimbangu : cet appel intérieur à refuser l’injustice, à élever la voix contre l’oppression, et à œuvrer pour une société plus équitable. Plus qu’un prophète, Simon Kimbangu reste une boussole morale et un repère historique pour un Congo en quête de vérité, de justice et de réconciliation.
La Rédaction