Une image choc, une interpellation, et une onde de choc dans la presse congolaise. Pour avoir diffusé et commenté des images montrant l’état de saleté avancé dans les installations du stade des Martyrs, temple sportif emblématique de la République démocratique du Congo, un journaliste congolais s’est retrouvé dans le viseur des services de sécurité. Selon plusieurs sources, l’interpellation s’est faite sans mandat judiciaire clair, évoquant une « mise aux arrêts administrative», au mépris des garanties légales les plus élémentaires.
Le tollé est immédiat. La société civile, les syndicats de journalistes et l’Union nationale de la presse du Congo (UNPC) sont montés au créneau pour dénoncer ce qu’ils qualifient de « dérive autoritaire». Pour eux, cette arrestation constitue une atteinte grave à la liberté de la presse, déjà mise à mal par un climat ambiant peu favorable à l’indépendance journalistique.
Un acte de journalisme ou un « sabotage institutionnel » ?
Côté autorités, le ton est tout autre. L’acte du journaliste, salarié d’une chaîne publique, est perçu comme une entorse à la loyauté professionnelle. « Une atteinte à l’image des institutions publiques», confient en off des sources sécuritaires, qui voient dans cette dénonciation publique un acte d’indiscipline, voire de « diffamation institutionnele».
Mais peut-on parler de diffamation quand les images parlent d’elles-mêmes ? Des sanitaires bouchés, des ordures entassées, des couloirs insalubres : la séquence publiée a surtout mis à nu les défaillances criantes de la gestion des infrastructures publiques dans le pays. Le stade des Martyrs, monument symbolique inauguré en 1994 et régulièrement cité dans les discours officiels comme « fierté nationale », apparaît ici dans un état de délabrement alarmant.
Journalisme d’État ou droit de dire la vérité ?
L’affaire soulève une question de fond : le rôle et la marge de manœuvre du journaliste dans un média d’État. Peut-on exercer un devoir d’informer loyalement, tout en évitant de froisser les sensibilités politiques ? Une tension persistante que ce dossier remet en pleine lumière. La liberté d’expression se heurte de plein fouet à une culture de contrôle de l’image publique, dans un pays où les critiques sont encore souvent assimilées à des actes de rébellion.
Un signal inquiétant
Plus qu’un fait divers médiatique, cette arrestation résonne comme un signal inquiétant dans le paysage congolais de la presse. Elle s’inscrit dans une tendance plus large de crispation des pouvoirs face aux critiques, notamment sur les réseaux sociaux et dans les médias indépendants.
L’UNPC, les ONG de défense des droits humains et plusieurs figures du monde médiatique exigent non seulement la libération immédiate du journaliste, mais aussi des garanties concrètes pour la liberté d’expression. Car à travers ce cas, c’est toute la question de la gouvernance, de la transparence et de l’état de droit qui est posée.
Si l’information est un droit, pas un crime est le fait de dénoncer une poubelle pleine dans un stade vide mène à la prison, la République reste à construire.
NGK