Quand la pluie devient un fléau…Kinshasa pleure ses morts et redoute l’avenir…
La capitale congolaise a été violemment frappée dans la nuit de vendredi à samedi par des pluies diluviennes, provoquant la mort d’au moins 19 personnes, selon un bilan provisoire communiqué par les autorités locales. La commune de Ngaliema est la plus durement touchée, avec 17 décès confirmés, tandis que Lemba enregistre 2 victimes. Des chiffres glaçants, qui pourraient grimper à mesure que les opérations de secours se poursuivent dans des quartiers encore inaccessibles.
Des quartiers entiers paralysés
Des maisons effondrées, des glissements de terrain, des têtes d’érosion béantes, et des routes dévastées. Kinshasa, mégapole de plus de 15 millions d’habitants, a une nouvelle fois cédé sous la violence d’une météo devenue de plus en plus imprévisible. Le tronçon de l’avenue Libération, entre la prison centrale de Makala et le marché Selembao, est criblé de nids de poule transformés en cratères, et certaines rues de Ngaliema présentent des failles inquiétantes devant les habitations.
« Un mur de clôture s’est écroulé sur une maison voisine et l’a détruite. Par miracle, il n’y a eu que des dégâts matériels », a relaté un voisin dans la cité des anciens combattants.
À Kintambo, le débordement de la rivière Maluku a submergé le pont Tshamala, coupant temporairement la liaison avec Bandalungwa, tandis que les eaux ont envahi les maisons bordant la rivière Makelele, causant de lourdes pertes matérielles.
Changement climatique : une réalité désormais palpable
Pour de nombreux Kinois, cette pluie en plein mois de juin, saison dite sèche, n’est rien de moins qu’un signal d’alarme climatique.
« Les pluies diluviennes ne se poursuivent pas au mois de juin. C’est anormal. On n’a jamais connu ça », s’étonne Madame Kahozi, religieuse de 65 ans.
« Quelque chose a changé. Les spécialistes doivent nous dire ce qui se passe, et les autorités doivent anticiper ! », ajoute-t-elle avec gravité.
Quand la prévention sauve des vies
Dans ce climat de désolation, une lueur d’espoir s’élève du quartier Immo-Congo, dans la commune de Kalamu, épargné grâce au projet Kin-Elenda, un programme controversé de démolition préventive de constructions illégales le long des rivières.
« Grâce au curage de la rivière Kalamu et à la libération des emprises, nous avons été épargnés cette nuit », se réjouit François Mputu, habitant du quartier.« Ce projet , que nous pensions punitif, s’avère être un acte salvateur. »
Ce succès local est également salué par les techniciens de la Société nationale d’électricité (SNEL) : leur poste stratégique de Funa, souvent menacé par les inondations, a cette fois été protégé, assurant la continuité de l’approvisionnement en électricité dans une large partie de la ville
Un appel à la vigilance et à l’action
Face à ce drame, les bourgmestres de Ngaliema et Lemba lancent un appel pressant à la population : redoubler de vigilance, respecter les consignes de sécurité et éviter les zones à risque. Mais au-delà des appels, c’est une véritable politique d’anticipation urbaine que les Kinois réclament.
« Kinshasa doit changer sa façon de penser la ville. Ce n’est plus une urgence, c’est une nécessité vitale », conclut un urbaniste local, rencontré sur les lieux du sinistre.
Alors que les pluies pourraient se poursuivre, Kinshasa panse ses plaies, enterre ses morts, et regarde le ciel avec inquiétude. Une ville déjà fragilisée, désormais en état d’alerte face à un climat qui n’a plus de règles.
Glad NGANGA