Passe d’armes à l’Assemblée nationale : patron de la SMB, le député Mwangachuchu accusé de semer l’insécurité à Masisi

Assemblée nationale

Tribune – Député élu de Masisi, Justin Ndayishimiye n’en démord pas. Après un réquisitoire sévère contre la SMB (Société Minière de Bisunzu) lors de la plénière du 23 novembre 2021 pour des actes de meurtres, tortures, extorsions et autres traitements inhumains et dégradants infligés aux populations de Masisi, il est encore revenu à la charge au travers d’une motion d’information au cours de la plénière du 19 mai 2022 pour dénoncer avec force les mêmes faits et exhorter le Gouvernement congolais à agir. Cette fois-ci, il a pointé du doigt son collègue Edouard Mwangachuchu qu’il a accusé d’entretenir dans cette partie de la République, plus précisément sur le PE 4731 à Rubaya, les milices de la mort. En réplique, ce dernier est aussi monté à la tribune pour rejeter l’accusation contre sa personne, soutenant également à son tour une commission parlementaire d’enquête afin de tirer au clair la situation qui prévaut dans cette partie du pays.

C’est un homme révolté, dépité, outré, inconsolable et qui ne sait, apparemment, à quel saint se vouer qui a pris, par motion d’information, la parole du haut de la tribune de l’Assemblée nationale le 19 mai dernier. Le député Justin Ndayishimiye, parce que c’est de lui qu’il s’agit, a tenu à sensibiliser ses collègues et susciter leur engagement sur la situation d’insécurité permanente qui prévaut dans son fief électoral, le Masisi. Laquelle situation est à la base de la mort de paisibles citoyens et autres traitements inhumains et dégradants infligés aux populations locales, voire de leur délocalisation. Tout droit au but, il a pointé du doigt son collègue et patron de la SMB, Édouard Mwangachchu, également présent dans l’Hémicycle, comme étant la source des malheurs qui s’abattent sur ses frères et sœurs du Masisi qui aspirent, pourtant, à vivre dans la paix et la quiétude.

A cet effet, le député Justin Ndayishimiye a évoqué les corps de trois habitants tués à bout portant en juin 2019 par la police truffée des éléments irréguliers commis à la garde des sites d’exploitation des minerais dans le PE 4731 attribué à la SMB ; lesquels corps sont sans sépulcres jusqu’à ce jour. Ils sont tout simplement gardés à la morgue de l’Hôpital de référence de Goma. Il ne comprend donc pas pourquoi justice ne leur a pas été toujours rendue, ce malgré les jugements à tous les échelons. Et de se demander si le Gouvernement, qui traîne aussi les pieds pour trouver une solution à la question de superposition des titres de la SMB sur ceux de la SAKIMA, dont la concession a été amputée, n’a pas carrement abandonné les populations de Masisi à leur triste sort. Il sied toutefois de rappeler que tout récemment, le député Édouard Mwangachucu a été interpellé et mis à gardé à vue à l’Auditorat militaire à Kinshasa. Il a été libéré sous caution.

Déroulant sa feuille d’accusation, l’élu de Masisi a laissé entendre qu’il ne faut pas se poser la question sur le financement des forces négatives qui sèment l’insécurité depuis des lustres dans sa contrée. Pour des raisons évidentes, la SMB, qui recrute à tour de bras des irréguliers qui sont dissimiiles par la suite dans la police, en est la principale source. Point n’est besoin d’évoquer l’affaire colonel Van Kasongo, commandant second de la Police provinciale au Nord-Kivu, rappelé à Kinshasa pour implication supposée dans cette basse besogne.

Présent dans la plénière, le député Edouard Mwangachuchu et patron de la SMB, ne pouvait pas ainsi avaler des couleuvres. Il a usé aussi du droit à la parole reconnu à tout député pour donner de la voix. C’était une véritable passe d’armes. Retournant le doigt accusateur contre son collègue, il a soutenu la mise en place d’une commission parlementaire à l’effet d’investiguer sur ce qui se passe réellement sur le terrain et, particulièrement, sur sa société et ce qu’elle rencontre comme problèmes. A l’occasion, il a promis de présenter ses desiderata et de donner des explications relativement aux accusations de son collègue Justin Ndayishimiye.

C’est pour la deuxième fois que le député Justin Ndayishimiye pose la problématique du Masisi par motion d’information. La première fois, ce fut lors de la plénière du 21 novembre 2021. Sans doute, il reviendra encore une fois à la charge si d’ici-là aucune solution efficace et durable n’est trouvée par le Gouvernement sous la poussée de l’Assemblée nationale.

Ainsi qu’il se dégage, la crise dans le Masisi est sous-tendue principalement par l’exploitation artisanale des minerais des 3 T sur fond de superposition des titres de la SMB sur ceux de  la SAKIMA et de bafouillage des droits des populations. En effet, le PE 4731 (36 carrés) attribué à la SMB et sur laquelle elle exerce ses activités minières résulte de l’amputation en 2000, lors de la rébellion du RCD/Goma dont Edouard Mwangachuchu fut haut cadre, de la concession de la SAKIMA, présentement réduite à 324 carrés. Il n’y a jamais eu cession par SAKIMA d’une partie de son patrimoine. Raison pour laquelle, les populations, qui rappellent aussi l’adhésion d’Edouard Mwangachuchu au CNDP et au M23,  qualifient cette occupation d’une portion de la concession de la précitée de butin de guerre. Chassées et devenues indésirables sur leurs terres, elles ne comprennent toujours pas pourquoi l’Etat congolais ne veut pas les rétablir dans leurs droits et faire également droit à la SAKIMA, propriétaire du PE 76 amputé, qui a manifesté, par une requête, ce désir. La balle revient donc au Gouvernement qui doit prendre, à bras le corps, cette question et trouver une fois pour toutes une solution. Autrement, la crise du Masisi sera récurrente.

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