Page d’histoire : Comment le président Kasa vubu a-t-il trouvé la mort ?

Joseph Kasa Vubu

« Peu de pays peuvent se permettre de perdre prématurément une si grande partie de leur élite .» Ainsi s’exprima le président Kasa-Vubu devant les Chambres réunies le 27 juillet 1961 à Lovanium. Dans l’histoire mouvementée du Congo, bien des compatriotes ont trouvé la mort dans les différentes sécessions et guerres qui ont meurtri le pays. Les acteurs politiques n’étaient pas en reste. Ils ont payé un lourd tribut. Beaucoup parmi eux ont péri parfois dans des circonstances difficiles à élucider. Tous sont décédés jeunes. Tous voulaient servir le Congo en faisant qui de la politique qui de l’armée. Tous avaient une foi inébranlable pour la R.D.C. Les uns sont morts empoisonnés, torturés inhumainement ou mutilés vivant ; les autres par contre ont été tout simplement assassinés. Parmi cette élite congolaise sacrifiée sur l’autel de la politique politicienne, nous pouvons citer pêle-mêle Prosper Madrandele Tanzi, Moïse Tshombe Kapenda, Nzondomio, Jason Sendwe, Lumumba, Pierre Mulele, les généraux Masiala, Wamba, Ikuku  et Mahele. Parmi eux aussi, le premier président du Congo indépendant : Joseph Kasa-Vubu. Mais dans quelle circonstance ce dernier est-il décédé? Était-ce une mort naturelle ou plutôt commanditée par une tierce personne si ce n’est par le régime militaire qui l’avait destitué? Qui lui en voulait et pourquoi ? Astreint à résidence, il mourut de manque des soins dans sa résidence surveillée de Kisundi située à Boma dans le Bas-Congo. Avant de tirer sa révérence, le « prési » fit ses dernières volontés à son fils aîné Adolphe et pour le Congo , il s’adressa à monseigneur Raymond Ndudi en ces termes: « Monseigneur, dites aux autorités de notre pays, de veiller à la sauvegarde de l’unité nationale et de préserver l’indépendance nationale. »  C’étaient ses dernières paroles. Puis quelques minutes plus tard, il s’endormit pour toujours. Nous avons découvert un document que nous avons jugé fiable. Voilà pourquoi nous l’avons versé dans ce dossier en le mettant à la connaissance et à la disposition dees congolais. Devoir de mémoire oblige.

Une piqûre empoisonnée

 Le 24 mars 1969 à 4 h 00, il rendit l’âme à Boma en sa résidence  sans possibilité de se rendre dans un hôpital.     Officiellement, il avait été emporté par une embolie cérébrale mais selon les nombreux témoignages, Kasa-Vubu aurait été victime d’un empoisonnement commandité par Mobutu. On sait que le président Kasa-Vubu avait été victime d’un accident de circulation lors de ses nombreux voyages qu’il effectuait vers Kinshasa en vue de finaliser certaines formalités administratives. Conduit à Kisantu où il fut examiné par Docteur Matondo qui ne remarqua aucun traumatisme, le président Kasa-Vubu eut la surprise d’ętre soumis à un autre examen, cette fois par un médecin envoyé spécialement par Mobutu. Ce médecin américain insista et réussit à administrer une injection au président Kasa-Vubu. Quoi qu’il n’y ait pas eu de preuve formelle de cet empoisonnement, il faut tout de même rappeler que d’autres hautes personnalités de la République sont mortes, au cours du règne de Mobutu, mystérieusement et curieusement de la même maladie que Kasa-Vubu. Si Kasa-Vubu n’avait que 52 ans, Prosper Madrandele, directeur du Bureau Politique n’en avait que 41 et le brillant professeur Makanda Kabobi avant Madrandele, mourut à 38 ans, deux ans après Kasa-Vubu. Nous taisons des cas comme celui de Nzondomio, ancien président de l’Assemblée nationale et autres… On sait aussi qu’à l’époque, la CIA expérimentait un produit qui tuait à petit feu avec une injection qui provoquait une hémorragie lente dans le cerveau.

Des obsèques royales

Quoi qu’il en soit, le décès de Kasa-Vubu fut pour le pouvoir, l’occasion de prouver encore une fois de plus sa bassesse et pour le peuple un moment de témoigner toute l’estime vis-à-vis de « son » président. Le pouvoir fut pris de panique. Mobutu se trouvant à l’étranger (en RFA), le peuple n’en profiterait-il pas pour se soulever? Pour parer à toute éventualité, on essaya d’étouffer la nouvelle du décès. L’électricité fut même coupée dans la résidence pour éviter tout attroupement. Peine perdue car la nouvelle se transmit de bouche à oreille jusqu’à Kinshasa. Craignant d’être débordé, le pouvoir consentit à ramener le corps à Kinshasa pour des funérailles nationales. Celles-ci furent émouvantes et spectaculaires. Lorsque quelques semaines plus tard, Mobutu se décida de se rendre à Singini, tous ceux qui l’accompagnaient remarquèrent l’accueil glacial qui lui fut réservé. Les enfants du défunt refusaient même de lui serrer la main.

Une déclaration de guerre

Tout le monde le considérait comme le véritable responsable de la mort de Kasa-Vubu ! Mobutu eut-il peur ? Personne ne le sait. Toujours est-il que la mort de Kasa-Vubu marqua le point de départ d’une croisade sans pitié contre ses partisans. A Matadi, le premier bourgmestre Mbuzi fut retrouvé avec une corde au cou et une pierre au fond de la rivière Mpozo. A Kinshasa, Raymond Bikebi, l’idéologue du parti, fut porté disparu. En fait, selon des témoignages fiables, il fut jeté vivant aux léopards du zoo présidentiel du Mont Ngaliema. Les gouverneurs Vital Moanda et Joseph Mbenza Thubi furent piégés et révoqués. Il en est de même du colonel Puati Jacques puis plus tard des généraux Masiala et Tshikeva. Quant aux membres de la famille Kasa-Vubu, leur survie ne fut possible qu’à coup d’humiliantes allégeances. Adolphe fut obligé d’aller travailler dans la ferme présidentielle de Gbadolite. Il y fut ridiculisé par un des fils de Mobutu qui faillit le tuer. C’est par miracle qu’il en sortit vivant, la rumeur publique  soutient qu’il y aurait reçu une petite dose d’une boisson malfaisante. Marie Rose, la deuxième enfant de la famille fut nommée bourgmestre puis député et membre du Bureau politique du MPR-parti Etat. Les autres enfants reçurent aussi quelques gratifications. Mobutu aurait voulu en échange de ces actes de magnanimité que cette famille se montre disciplinée, soumise et qu’elle soit oubliée. Lui-même d’ailleurs fut le premier à enterrer Kasa-Vubu en élevant  Lumumba et sa propre épouse au rang des héros nationaux tout en oubliant le Père de l’indépendance que fut Kasa-Vubu. Il n’en sera pas autrement comme le montre la dénonciation lue à la tribune de la Conférence Nationale Souveraine (CNS) par Marie Rose Kasa-Vubu au nom de sa mère et de la famille ; une dénonciation qui provoqua la colère de Mobutu. Mais tout cela n’a pas pour autant découragé les enfants.

Digitalcongo.net

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