À mon enfant qui va naître,
Si tu lis ces mots un jour, sache que je les ai écrits avant de repartir au combat. Peut-être ne reviendrai-je pas. Peut-être ne connaîtrai-je jamais ton visage. Mais je veux que tu saches qui nous sommes, d’où nous venons, et pourquoi nous nous battons.
L’histoire est une arme. Ceux qui l’oublient sont condamnés à devenir esclaves. C’est pour cela que je grave ces vérités dans ce papier, pour que toi, mon fils, tu ne sois jamais un esclave sur la terre de tes ancêtres.
Tu entendras peut-être dire un jour que les Tutsi sont des frères africains, des voisins avec qui nous devrions coexister en paix. Mais sache que derrière ces mots se cache une guerre silencieuse, une guerre qui dure depuis des siècles.
Les Tutsi ne sont pas un peuple autochtone du Kivu. Ils sont les héritiers de l’Empire Hima, un projet expansionniste visant à dominer toute la région des Grands Lacs. Ce projet ne date pas d’hier. Depuis des siècles, les Tutsi ont tenté d’étendre leur domination sur les terres des Bantous. Ils ont conquis le Rwanda, le Burundi qui leur a été ravis et sous menace actuellement, et aujourd’hui après le soudan, le Kenya et une partie de l’ouganda, ils veulent s’emparer du Kivu.
Ce n’est pas un hasard si, depuis 30 ans, le sang des Congolais coule sans interruption. Ce n’est pas une simple guerre. C’est une invasion déguisée, un génocide silencieux.
L’Empire Hima n’est pas qu’un rêve lointain. Il est en marche.
Regarde la carte, mon fils. Vois comment les territoires de l’Est sont grignotés. Vois comment les collines de Masisi, Rutshuru, Nyiragongo, Walikale et Kalehe, sont colonisées. Chaque pas qu’ils font est un pas de moins vers notre liberté. C’est pour quoi je me bas pour Walungu, Mwenga, Uvira et Fizi avec espoir de reprendre le contrôle de Bukavu et récupérer les autres territoires sous contrôle du Nord Kivu et du Sud Kivu.
Il fut un temps où les terres du Nord et du Sud-Kivu appartenaient aux peuples Bantous. Les Havu, les Hunde, les Nande, les Bembe, les Shi, les Rega, les Lega… Nos ancêtres cultivaient ces terres, les défendaient, les transmettaient à leurs enfants.
Mais aujourd’hui, nous sommes des étrangers chez nous et nous valons rien ailleurs. On nous traite de lache.
Regarde comment ils ont procédé :
Ils ont utilisé la guerre pour nous affaiblir. Depuis 1996, chaque rébellion, chaque massacre, chaque exode a permis aux Tutsi de prendre du terrain et de s’installer. C’est le moment du déguerpissement.
Ils ont infiltré nos institutions. Le pouvoir à Kinshasa a été trahi par ceux qui collaborent avec l’ennemi. Des traîtres Bantous, pour de l’argent et des postes, livrent leur propre peuple à l’occupation. La liste est connue. Ils seront tous exterminés avec assurance d’en avoir écrasé la descendance connue sur le sol des ancêtres.
Ils ont utilisé les Nations Unies. La MONUSCO, censée protéger les Congolais, est restée passive pendant les massacres. Pourquoi ? Parce que les grandes puissances veulent notre coltan, notre or, nos diamants.
Ils ont imposé leur loi par la force. Aujourd’hui, dans certaines zones, tu ne peux plus parler ta langue maternelle sans craindre des représailles.
Mon fils, un peuple qui perd sa terre perd aussi son âme.
On nous a toujours dit : “Soyez pacifiques. Ne prenez pas les armes. Faites confiance aux négociations.” il s’agit d’une illusion de la paix.
Mais où nous ont menés ces paroles ?
Nos villages ont été brûlés.
Nos femmes, vos soeurs et vos futures épouses ont été violées et continuent d’être violées à répétion.
Nombeux de vous ont grandi sans pères.
Nos ancêtres pleurent dans leurs tombes, car nous avons laissé l’ennemi souiller notre terre sacrée. Ils crient vengeance et sentir leurs sangs pénétrer nos terres.
Mon fils, sache que l’histoire est cyclique. Ceux qui nous tuent aujourd’hui oublient que nous avons déjà connu la guerre, et que nous savons nous battre. C’est le moment. Tes aînés majeurs s’entraînent à se battre et à me rejoindre dans la lutte.
Regarde ce qui s’est passé en 1996, en 1998, en 2004, en 2012, ils nous ont massacré en masse par toutes les armes. À chaque fois, ils pensaient avoir gagné, mais à chaque fois, le peuple congolais s’est relevé.
Aujourd’hui, les Wazalendo se lèvent. Nous avons compris que la seule chose que l’ennemi respecte, c’est la force.
Mon fils, si un jour tu dois te battre, utilise toute arme à ta possession( machette, couteau, hache, flèche, lance pierre, substance toxique, talents intellectuels, …) et souviens-toi de ces règles :
1. Ne sois jamais naïf. Un ennemi qui te sourit aujourd’hui peut te poignarder demain.
2. Garde ta terre sacrée. Un peuple qui perd son sol devient un peuple errant, condamné à l’esclavage.
3. N’accepte jamais l’humiliation. Si on te traite comme un esclave, relève-toi et deviens un lion.
4. Transmets la vérité à tes enfants. Car l’ennemi combat avec l’histoire. Il mentira pour effacer notre passé.
Nous ne sommes pas des agresseurs. Nous sommes des défenseurs. Nous ne voulons pas la guerre, mais nous ne pouvons plus fuir.
Mon fils, si je meurs, pleure-moi, mais ne sois pas triste. Car je meurs debout, comme un homme libre.
Si je reviens, je te prendrai dans mes bras et je te raconterai cette guerre.
Mais si je ne reviens pas, souviens-toi : cette terre est tienne. Protège-la.
Et si un jour quelqu’un te dit que les Tutsi ont toujours vécu ici, que le Kivu leur appartient aussi, réponds-lui ceci :
“Si c’était vrai, pourquoi ont-ils besoin de nous tuer pour s’installer ?”
L’histoire nous jugera, mon fils. Mais nous, nous avons choisi de nous battre.
Vive le Congo libre.
Mzalendo Wa Congo
La Patrie ou la Mort