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LA RDC FACE AU DANGER DE LA “DIVISION RÉGIONALE DU TRAVAIL »

 

Par Me Charles Kabuya

Si la balkanisation a toujours été un danger suspendu sur la tête des congolais comme une épée de Damoclès, il existe un autre danger, encore plus insidieux, qui pointe le bout de son nez depuis quelques décennies.

Après la vague de décolonisation qui avait débuté en 1947 en Asie, les économistes tiers-mondistes fustigèrent la perpétuation de la colonisation sur le plan économique, symbolisée par ce qu’on a appelé “la division internationale du travail”(DIT).
Celle-ci consistait globalement à assigner aux pays du Tiers monde le rôle de pourvoyeurs de matières premières brutes et à réserver aux pays développés d’Occident le monopole des produits finis, à forte valeur ajoutée.

Cette répartition des rôles s’est modifiée au cours des années 70 avec l’évolution spectaculaire de certains pays d’Asie, qui furent appelés les “quatre dragons” (Singapour, Hong Kong, Taiwan et Corée du Sud). À partir des années 80, ils seront rejoints dans le club des pays à forte croissance industrielle, dont faisaient également partie le Brésil et le Mexique, par les “Tigres » (Thaïlande, Malaisie, Vietnam, Philippine, Indonésie).

Tous ces pays font désormais partie des nouvelles puissances industrielles réunies avec la Chine, la Russie, l’Inde sous l’acronyme des BRICS+, qui comptent en leur sein d’autres pays émergents comme l’Afrique du Sud, l’Éthiopie et les Emirats arabes unis, et qui ne cessent de grossir et de disputer le monopole des industries et des nouvelles technologies aux pays occidentaux du G7.

Si le bouleversement du schéma du commerce international par les BRICS+ semble fatal à la forme traditionnelle de la division internationale du travail, à l’échelle de l’Afrique la sous-industrialisation et la quasi inexistence de l’innovation maintiennent le continent dans la spécialisation héritée de la colonisation.
La pauvreté sur le continent africain provient grandement de cette stagnation, car une majorité de pays africains n’ont pas développé une industrie locale et conservent l’assignation de pourvoyeurs de matières premières brutes, dont le produit est mal géré par ailleurs.

C’est le cas de la RDC qui affiche un niveau de sous industrialisation inquiétant pour son avenir. De ce fait, elle dépend des importations pour les produits manufacturés, et même pour les produits alimentaires du fait de la faiblesse de son secteur agroalimentaire.
En même temps, le pays est semi enclavé et il demeure dans une sous capacité portuaire chronique, n’ayant pas développé un port en eau profonde. Cette faiblesse infrastructurelle de la RDC, qui ne possède même pas de connexions terrestres et fluviales optimisées sur son vaste territoire, a favorisé son attraction, presque fatale, dans le giron économique du corridor de Lobito, un vaste projet économique développé en Angola avec le soutien des USA.

Plus dangereux encore, l’est du pays, région riche en minerais critiques, est depuis des décennies sous la coupe du Rwanda et de l’Ouganda, qui déstabilisent cette partie du Congo et pillent ses ressources naturelles. Cette insécurité est entretenue par le biais des groupes armés fantoches, comme l’AFC/M23 qui contrôle aujourd’hui Goma et Bukavu, et d’invasions récurrentes, empêchant toute organisation économique, et de fait, toute possibilité de développement économique par l’industrialisation.

Les actuelles négociations de paix, que ce soit sous l’égide de l’Union africaine, du Qatar ou sous le patronage des USA, semblent aller dans le sens d’une paix conditionnée au partage des richesses naturelles de la RDC.
Le Rwanda et l’Ouganda (avec la complicité du Kenya de Ruto), se positionnent ouvertement comme les corridors sécuritaires pour les échanges, et comme pays d’accueil des investisseurs et des industries de transformation des matières premières congolaises.

D’ailleurs, il existe depuis longtemps un mouvement d’aspiration des ressources naturelles congolaises, qui se traduit par des statistiques d’exportation du Rwanda et de l’Ouganda faisant apparaître des chiffres irréels pour certaines matières non produites dans des proportions équivalentes par ces pays. D’autre part, des unités de transformation de ces produits ont été opportunément installées dans ces pays, certaines à proximité de la frontière congolaise.

Le schéma de spécialisation régionale est notamment vendu par Kagame, qui s’évertue à profiler le Rwanda en pays hyper militarisé, y compris par la production de son propre armement. Il offre déjà ses services de mercenariat pour sécuriser les intérêts économiques de certains groupes industriels européens, ce qui lui vaut d’être préservé de réelles sanctions malgré ses effroyables violations des droits humains en RDC et dans son pays.

Pour contrer ce schéma dont les promoteurs n’hésitent pas à recourir au “Congo bashing”, la RDC doit travailler en profondeur sur les avantages comparatifs : nos ressources colossales, notre vaste territoire et ses immenses terres arables, la jeunesse de notre population et notre abondante main d’oeuvre, notre capacité de nous unir (plus de 350 ethnies sans guerres tribales ni tensions ethniques comme au Rwanda), le formidable défi du développement que nos atouts présentent si la sécurité est maîtrisée dans l’est etc.
Et bien entendu, des réformes favorisant la bonne gouvernance, la croissance économique et un bon climat des affaires.

Sans un sursaut énergique pour se donner les moyens de contrer ce plan de domination et de prédation afro-coloniale, le Congo risque de se retrouver assigné au rôle de réservoir de matières premières pour ses voisins prédateurs, et contraint de leur livrer ses 120 millions de consommateurs, au sein d’une division régionale du travail asymétrique et imposée par la loi du plus fort.

En somme, le destin d’un pays rendu fictif, car n’ayant plus aucune emprise économique sur son territoire…

Charles Kabuya

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