Des images commentées de l’histoire du Congo

L’histoire du Congo est longue et passionnante, dévorante et saisissante, trouble et pitoyable. Pendant plus d’un siècle, elle s’écrit le plus souvent en lettres de sang. Comme toute vie, celle de la RDC est aussi jalonné de pleurs, de larmes, de tristesse, d’angoisse et de joie indescriptible. Ces images commentées sont un rappel de quelques moments forts choisis au hasard pour illustrer l’histoire de la RDC.

1904 : Le caoutchouc rouge 

La main et le pied d’une fille de cinq ans coupés et envoyés à son père, tel est le colis macabre que les milices de l’Abir (Anglo-Belgian India Rubber Company) ont offert au Congolais Nsala. L’histoire se déroule en 1904 au village Wala dans le secteur de Nsongo dans l’actuel Sud-Ubangi dans ce qui est encore l’État Indépendant du Congo. Cette fillette dont le corps est démembré s’appelle Boali, tuée en même temps que sa mère. Leur village n’a pas répondu aux quotas de caoutchouc imposé par Léopold II. Pour ce genre d’infraction, des punitions sévères sont infligées aux ″auteurs de délits économiques″ entendez des Congolais qui ne récoltent pas suffisamment la quantité de caoutchouc exigée. Les atrocités du régime léopoldien relatives à ce que l’on qualifia à l’époque de ″caoutchouc rouge″ a coûté la vie à dix millions de Congolais sans oublier les mutilations. Aujourd’hui encore ce passé sombre se répète avec ″les minerais de sang » de l’est du Congo qui sont la cause principale du second génocide congolais avec plus de six  millions de morts. L’histoire est vraiment un éternel recommencement.

1956 : Le premier évêque congolais 

Le 18 novembre 1956 soit près de quatre ans avant l’indépendance, une ordination épiscopale a lieu à Kisantu à 150 km de Léopoldville. Le premier évêque congolais en la personne de Pierre Kimbondo y est consacré. Il est aussi le premier monseigneur noir de toute l’Afrique centrale. Puis sont ordonnés tour à tour Joseph Nkongolo de Mbuji-Mayi (1er juillet 1959), Joseph Malula de Léopoldville (20 septembre 1959), Joseph Busimba de Goma (8 mai 1960), Simon Nzita de Matadi (12 février 1961) et Louis Nganga de Lisala (9 juillet 1961).

1960 : La dernière victime de la colonisation

Nationaliste, prêtre catholique, indépendantiste, abbé Jean Loya a fait tourner la tête aux colons. Il se manifeste publiquement en aidant Kasa-Vubu à s’échapper des mailles du filet tendu par les autorités coloniales pour l’arrêter. Ses prêches incendiaires à la paroisse saint Pie X de Ngiri-Ngiri ne sont pas du goût des Belges qui voient en lui un réveilleur de conscience si pas un révolutionnaire. Pour étouffer cette voix discordante, un assassinat politique déguisé en accident de circulation est fomenté contre lui au niveau de Lukusu dans le Kongo Central. La bête noire des autorités coloniales meurt dans sa coccinelle écrasée par un imposant camion militaire un mois seulement avant l’indépendance du Congo. Le 30 mai 1960 s’est tue pour toujours cette voix que les autorités belges n’aimaient pas entendre. L’homme qui a lutté dans l’ombre pour l’indépendance n’a pas vécu l’entrée du Congo dans le concert des nations, ce pays qu’il aimait tant.

1960 : Miss Indépendance

Le 30 juin 1960, le Congo devient un Etat souverain. A Bruxelles, outre les cérémonies officielles et en parallèle à celles-ci se tient un événement culturel. En effet, à l’occasion de la commémoration de l’indépendance est organisé dans la capitale belge un concours de beauté réservé aux jeunes femmes congolaises. Lors du gala organisé pour la circonstance, la communauté congolaise de Belgique a élu une jeune étudiante de Bukavu comme Miss Indépendance 1960. La belle dame s’appelle Juliette Kmond.

1960 : L’adieu au dernier gouverneur-généralbelge

Même si le Congo est devenu indépendant le 30 juin,  le dernier symbole de la colonisation n’est parti que cinq jours plus tard. Henri Cornelis, le dernier gouverneur-général du Congo belge a quitté Léopoldville le 5 juillet 1960 à 10 heures. Tout le gotha politique congolais est venu lui faire ses adieux à l’aéroport de Ndjili. Le président, le premier ministre, les membres du gouvernement, les présidents des deux chambres (assemblée nationale et sénat) sont là, Moïse Tshombe aussi. Accompagné du vice-président du Conseil des ministres Antoine Gizenga dans l’avion de commandement, le fonctionnaire belge et sa famille se sont rendus à Matadi pour s’embarquer à bord du Jadotville afin de regagner la Belgique.  Le 11 juillet 1960, soit six jours seulement après le retour définitif de Cornelis dans son pays, Moïse Tshombe proclame l’indépendance du Katanga. La sécession katangaise vient de commencer.

1961 : La Coupe du Congo de football

La Fécofa créé la Coupe du Congo. Elle est une compétition annuelle de football disputée entre les clubs congolais. La fédération met en jeu le Trophée du Président de la République. La finale de la première édition oppose St Éloi  et V. Club au stade roi Baudoin aujourd’hui Tata Raphaël. Les Lushois remportent la partie haut la main devant les Kinois (5 – 1). A cette époque le vainqueur de la Coupe du Congo est aussi considéré comme le champion national.

1961 : Bonga-Bonga dans la meilleure équipe  du monde

Entre 1960 et 1992 le journaliste Eric Batty de la World Soccer Magazine se plait à choisir le World XI c’est-à-dire les onze meilleurs joueurs du monde. C’est en quelque sorte la meilleure équipe du monde. Les joueurs sont sélectionnés poste par poste. Dans sa seconde édition parue en 1961, le nom d’un Africain y est inclus. C’est celui de Paul Bonga-Bonga, le Congolais du Standard de Liège. Son patronyme côtoie ceux des grands joueurs notamment Pelé, Di Stefano et Gento. Le milieu de terrain congolais est aussi l’artisan principal de la victoire de son équipe au championnat belge que les rouge et blanc gagnent pour la seconde fois. En 32 ans de publication de la meilleure équipe du monde par Eric Batty, Bonga-Bonga reste le seul footballeur africain à avoir été honoré par le célèbre journal britannique. Il serait donc le meilleur joueur africain de tous les temps.

1965 : Le cauchemar congolais de « Tatu » Guevara

A l’aube du 24 avril 1965, venu de Tanzanie de Julius Nyerere, Che Guevara traverse incognito le lac Tanganyika avec une centaine de révolutionnaires cubains pour la plupart de race noire. Il s’installe sur la rive congolaise plus précisément dans les terres sud-kivutiennes de Kibamba sous le nom de code Tatu (trois en swahili). C’est son ordre d’apparition comme médecin sur la liste des combattants cubains venus au Congo. Le but du Che est de soutenir la révolution en plein cœur de l’Afrique en  prêtant main forte aux rebelles de Laurent-Désiré Kabila. Mais ce rêve se transforme en cauchemar. Le révolutionnaire est très vite confronté à la zizanie entre les chefs, à la désorganisation, à l’indiscipline des combattants, aux désertions au sein de l’Armée de libération de Kabila qui n’est jamais là. Déçu par les rebelles congolais, malade et alors qu’il court le risque d’être capturé par les forces loyalistes de l’ANC, le Che est exfiltré par un groupe dépêché d’urgence de Cuba. C’est la débâcle. Il quitte le Congo dans la nuit du 20 au 21 novembre 1965 soit à quelques jours seulement de la prise du pouvoir par Mobutu. Che Guevara décrit le fiasco de  son aventure congolaise dans son journal personnel avec des mots peu flatteurs. « Ceci est l’histoire d’un échec. Pour être plus précis, ceci est l’histoire d’une décomposition », écrit-il. Avant d’ajouter : « Un de nos camarades disait pour plaisanter qu’au Congo étaient réunies toutes les conditions contraires à la révolution ». Le héros de la révolution cubaine n’a pas réussi à concrétiser son rêve : cubaniser le Congo.   

1966 : L’introduction des examens d’Etat

Lorsque Mobutu s’empare du pouvoir en novembre 1965, le général Mulamba nomme à la tête du ministère de l’Education nationale un prêtre en la personne de l’abbé Athanàse Djadi. Celui-ci initie une grande reforme en vue d’harmoniser le programme scolaire. A l’époque, chaque réseau d’enseignement secondaire a ses propres critères d’évaluation et organisent à sa manière les examens de fin d’études secondaires. Les examens d’Etat sont une épreuve nationale organisée par le ministère de l’Education Nationale et effectuée par les élèves de la sixième année des humanités toutes section confondues. Ils se déroulent dans des centres choisis par l’inspection générale de l’enseignement secondaire. Ils durent au moins deux semaines reparties entre les examens écrits et oraux. Entre les deux séries d’épreuves il y a un intermède de deux jours durant lequel se passent les examens de maturité qui décident de l’admission d’un élève à l’université ou aux études supérieures. Le diplôme d’Etat sanctionne la fin des études secondaires. Les résultats sont publiés dans les journaux. La première promotion des élèves qui ont passé les examens d’Etat est celle de l’année scolaire 1966-1967.

1966 : Horreur dans la ville

Le dimanche 29 mai 1966, jour de la Pentecôte, quatre personnalités politiques de haut  niveau sont  arrêtés à la résidence du colonel Alphonse Bangala, le gouverneur de la ville où ils se réunissent. Le lendemain, Mobutu d’une voix qui cache mal sa colère et son émotion s’adresse au peuple dans un message radiodiffusé parlant d’un complot dirigé contre sa personne et le nouveau régime et qui a été ourdi par quelques politiciens irresponsables. Puis, il signe une ordonnance-loi créant un tribunal militaire d’exception composé d’un président, le colonel Pierre Ingila et de deux juges, les colonels Ferdinand Malila et Honoré Nkulufa. Les conjurés comparaissent sans défense le mardi 31 mai dans l’après-midi. Ils sont ligotés aux pieds et menottés. Le procès se déroule en plein air au camp Kokolo devant 20.000 personnes. Expéditif, il ne dure que 90 minutes. Cinq minutes de délibération suffisent au tribunal pour prononcer la sentence de mort par pendaison.  Mobutu reste sourd et insensible à la vague d’indignations soulevée par cette décision. Les demandes de grâce ou de  commutation de la peine capitale à la prison à vie faites par les présidents Massamba-Débat du Congo-Brazzaville, Lyndon Johnson des États-Unis et Charles de Gaulle de France, le roi Baudouin de Belgique, la reine Élisabeth II de  Grande-Bretagne, le pape Paul VI voire Amnesty International ne parviennent pas à le dissuader.

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Le jeudi 2 juin 1966 est déclaré chômé dans la ville de Léopoldville (Kinshasa) pour permettre à la population d’assister à l’exécution. Elle a lieu à la Place de la Cité où est installée une estrade surmontée d’une potence qui domine la scène de toute sa stature. Ameutées par la propagande officielle, plus de cent mille personnes s’amassent dans le site du pont Cabu (actuel pont Kasa-Vubu) entièrement cerné de camions bondés de soldats. La fanfare joue des marches militaires jusqu’à l’apparition du bourreau vêtu de noir et encapuchonné de noir. Les condamnés arrivent à bord d’une jeep de l’armée. A côté sont placés quatre cercueils blancs dont l’un est ouvert d’avance. Puis commence la procession macabre des condamnés vers la mort. Ils ont les yeux crevés et sont cagoulés. Kimba, Bamba, Anany et Mahamba qui ont subi des sévices dans la nuit précédant leur pendaison quittent la jeep chacun à son tour à l’énoncé de son nom, arpente l’estrade, écoute la lecture de la sentence avant l’échafaud. Les Kinois stupéfaits suivent en direct ce film d’horreur dont le réalisateur n’est autre que Mobutu lui-même, la mise en scène diabolique étant l’œuvre des colonels Efomi et Bangala. Commandant en chef de l’armée nationale congolaise, le général Bobozo supervise personnellement l’odieux spectacle. La pendaison est suivie dans un silence glacial entrecoupé des cris d’effroi lorsque la trappe s’ouvre. La foule est terrifiée. L’agonie insoutenable des suppliciés dont celle de Kimba qui dure une vingtaine de minutes, crée la stupeur. La dernière exécution, celle d’Alexandre Mahamba, provoque la panique générale. Les badauds hébétés et blessés dans toute leur humanité n’arrivent plus supporter cette scène machiavélique. Et c’est la cohue, la débandade, le sauve-qui-peut. Même le bourreau prend la poudre d’escampette.

Les corps sont ensuite inhumés à la va-vite dans des tombes vagues au cimetière de Kintambo. A l’époque des faits, Etienne Tshisekedi, ministre de l’Intérieur et des Affaires coutumières dans le gouvernement Mulamba a justifié la pendaison, arguant lors d’une interview accordée à la télévision belge que « le tribunal était indépendant, très indépendant même ».

En octobre 1988, comme pour conjurer le spectre des fantômes des pendus qui depuis juin 1966 planent sur ce lieu et comme pour camoufler ce mauvais souvenir de la mémoire collective, Mobutu fait raser la salle Cultrana et ses environs. Cette Place de la Cité devenue place du supplice avec ses bâtiments coloniaux toujours debout tels des témoins gênants devrait disparaître pour tourner la page de ces pendaisons tant décriées. Il a fallu changer l’atmosphère morose qui baigne le lieu en un climat d’allégresse où l’euphorie sera de mise. Sese Seko y fait construire le plus grand temple du football congolais, le stade Kamanyola. Ce nom rappelle un de ses exploits militaires. L’homme du 24 novembre veut continuer à faire vivre sa légende et son mythe. En 1997, alors que le maréchal déchu est sur le chemin de l’exil, Laurent-Désiré Kabila qui l’a chassé du pouvoir honore les quatre politiciens pendus en débaptisant le stade qui désormais s’appelle Stade des Martyrs de la Pentecôte.  En 2021, les conjurés de la Pentecôte 1966 ont une sépulture digne de ce nom. La réhabilitation de leurs tombes au cimetière de Kintambo où ils reposent pour l’éternité a été possible grâce à la ténacité de l’ASBL Bena Kongo avec le projet Kimpa Vita.

1967 : La revue Jeunes pour jeunes

Initiée par Freddy-David Mulongo et son complice Flor Ngoie, la revue Jeunes pour jeunes tient la jeunesse congolaise en haeine. Le Congo fait son enrtée dans l’univers de la BD. La sortie de chaque numéro est attendue avec impatience. Denis Boyau, l’illustrateur principal crée des personnages dont les aventures se confondent avec le vécu des Congolais. Ils ont pour nom Apolosa, Kikwata, brigadier Mungala, Coco, Didi, Durango, Wabuza et tant d’autres. Jeunes pour jeunes fait oublier toutes les bandes dessinées venues d’ailleur, de Tintin à Akim en passant par Ric Hochet et Zembla. Puis paraît Hit Parade, une revue musicale éditée par la même maison.

1968 : La beauté congolaise à l’assaut du monde

En juillet 1968, Elisabeth Tavares élue Miss Congo1968 s’en va à Miami Beach pour participer au concours de Miss Univers. Une première ! La belle Congolaise est considérée par ses rivales comme la favorite pour remporter cette épreuve de beauté féminine. Elle a tous les atouts : magnificence, élégance, éclat et grâce. Elle est la proie des journaux qui couvrent l’événement, la vedette principale qui fait l’actualité. Des titres de presse en disent long sur la représentante de la RDC « Miss Univers peut être une candidate noire »; « Miss Congo favorite dans le concours de beauté », « Les candidats soutiennent Miss Congo pour être la gagnante ». La Parisienne Elisabeth Cadren la Miss France qui est sa colocataire déclare en touchant la peau de Tavares et la sienne : « Elle est le café et je suis le lait ». Puis d’ajouter : « Elle est belle et je ne vois aucune raison pour laquelle elle ne devrait pas être Miss Univers. » Et Miss Australie de commenter : « Elle peut gagner. J’aimerais la voir gagner. Elle est très attirante ». A tous ces mots avenants, Elisabeth Tavares conclu : « Si je gagne, ce serait un pas en avant pour la fraternité du monde. » Elles étaient au total 65 jolies filles venues de tous les continents. Malgré tous les éloges, la première représentante du Congo au concours de Miss Univers n’a pas réussi à se qualifier. Du moins, elle aura laissé une impression vivante de la beauté négro-africaine.  

1969 : L’étudiant François Kandolo sort de prison

Le 14 octobre 1969, Mobutu a 39 ans. Il profite de son anniversaire pour gracier les étudiants meneurs du mouvement de 4 juin 1969. François Kandolo qui a été considéré comme le cerveau moteur de ce mouvement et qui a été incarcéré à la prison de Ndolo a aussi bénéficié de cette mesure de grâce présidentielle et autorisé à reprendre ses études à Lovanium. Lors de leur audience dans la salle Assanef, beaucoup d’étudiants ont été condamnés à de très lourdes peines de prison allant jusqu’à vingt ans.

1973 : Les Léopards qualifiés pour le Mundial allemand

Le 9 décembre 1973 a lieu au stade du 20 Mai (aujourd’hui Tata Raphael) à  Kinshasa une rencontre de très grande importance. Dans le cadre du tour final des éliminatoire de la coupe du monde en Allemagne, les Léopards du Zaïre croisent le fer avec les Lions de l’Atlas du Maroc. La manche aller qui se joue à Kinshasa est à l’avantage des Zaïrois qui remportent le match par 3 buts à rien. Kembo, l’homme du jour, trouve la faille à deux reprises précisément à la 58e et à la 61e minutes. Mbungu Tex qui le remplace cloue l’espoir des Marocains à la 79e minute. Vu l’avance au marquoir, le match retour n’est qu’une formalité. Au soir de la rencontre, la population savoure cette victoire synonyme de qualification à la coupe du monde, une première pour une équipe de l’Afrique noire. Une foule immense envahit les grandes artères de la capitale. Mobutu lui-même vient s’ajouter furtivement à cette meute en joie. Au lendemain de cette victoire historique, plusieurs décisions sont prises. Le gouvernement promet une maison et une voiture à chaque joueur en guise de récompense. A cela s’ajoute un voyage pour leurs vacances. Une cagnotte est créée. Tous les Zaïrois sont priés de mettre la main à la pâte pour soutenir l’équipe nationale dans son aventure en Allemagne. Le match retour n’aura pas lieu, le Maroc ayant déclaré forfait. Kembo qui a fait souffrir le gardien marocain n’est pas du voyage pour des raisons de sécurité. L’équipe qui a permis au Zaïre d’accéder à la phase finale de la coupe du monde en Allemagne est la suivante : Kazadi, Mwepu, Mukombo, Bwanga, Lobilo, Mana, Mayanga (Ndaye 46′), Kibonge, Kembo (Mbungu 71′), Kidumu, Kakoko.

1974 : La brigade mobile

En 1974, une nouvelle unité de police est créée. Elle s’appelle Brigade mobile. C’est une grande innovation. La tenue de ces policiers est semblable à celle de la police américaine, avec casque et pistolet à la ceinture. La nouvelle unité dont la mission est la traque des bandits armés roule dans des voitures Chevrolet Nova exactement comme leurs homologues américains. La Brigade Mobile installe son quartier général derrière le marché central de Kinshasa dans les locaux de l’Ofitra. Elle disparaît lorsque la police est intégrée dans la gendarmerie.

1974 : Rumble in the jungle

L’annonce a surpris plus d’un. Sous la houlette de Mobutu qui a mobilisé les moyens  financiers conséquents, le combat du siècle opposant le champion en titre George Foreman et son challenger Mohamed Ali aura bien lieu à Kinshasa. La préparation de ce championnat du monde de boxe qui doit être diffusé en mondovision (sauf au Zaïre) occasionne la fermeture du stade 20 Mai à toutes les activités sportives pour cause de rénovation. Le championnat de Kinshasa est relégué au stade du 24 Novembre. Ce que la presse américaine qualifie de « Rumble in the jungle » (Combat dans la jungle) est prévu pour le 25 septembre 1974 à 3 heures du matin en pleine nuit afin de permettre aux téléspectateurs américains de suivre le spectacle en direct. Mais à l’approche du jour j, Big George se blesse à arcade sourcilière à l’entrainement. Le combat est repoussé de six semaines. La nouvelle date est fixée au mercredi 30 octobre à la même heure.

En prélude à ce grand événement sportif est organisé Zaïre 74, un festival de musique de trois jours. Plusieurs grandes vedettes pour la plupart de race noire font le déplacement. Le monde noir a rendez-vous avec l’Afrique noire à Kinshasa. Sur le podium monté au stade du 20 Mai, les Afro-Cubains (Celia Cruz, Johnny Pacheco), les Afro- Américains (BB King, James Brown, Lloyd Price, Ray Barretto et la Fania All Stars), les Sud-Africains exilés pour leur penchant anti-apartheid Miriam Makeba et Hugh Masekela partagent la scène avec les artistes-musiciens congolais.

1991 : L’Union sacrée

Le 17 juin 1991, un protocole d’accord est signé entre trois partis d’opposition à savoir l’Union des fédéralistes et des républicains indépendants (UFERI) deJean Nguz Karl I Bond , l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) d’Etienne Tshisekedi wa Mulumbaet le Parti démocrate et social-chrétien (PDSC) de Joseph Ileo Songo Amba. L’Union Sacrée de l’Opposition Radicale est née. Plus tard, elle s’élargit à d’autres partis dont la DCF (Démocratie chrétienne fédéraliste) du professeur Ferdinand Ngoma Ngambupour devenir l’Union Sacrée de l’Opposition Radicale et Alliés. Le but avisé est de chasser Mobutu du pouvoir. Mais le maréchal ne s’avouant pas vaincu réussit à torpiller la plateforme en y débauchant certaines de ses grosses légumes notamment Nguz Karl I Bond et Mungul Diaka en les nommant premier ministre.Le professeur Ngoma Ngambu trouvera même une formule lacunaire pour décrire la situation du pays : « Le Zaïre, c’est soit du provisoirement définitif, soit du définitivement provisoire″.

1997 : La grande illusion

Le 17 mai, les troupes de l’AFDL conduite par le général rwandais Kabarebe entrent triomphalement à Kinshasa. Des enfants soldats appelés ″kadogo″ mêlés aux Rwandais sont accueillis en libérateurs. Vomi par la population, Mobutu qui a régné sans partage pendant 32 ans a fui la veille. Le nouvel homme fort s’appelle désormais Laurent-Désiré Kabila qui aussitôt s’autoproclame président. Il enterre aussitôt le Zaïre. Le pays retrouve son nom d’antan en redevenant Congo. Mais vite l’homme se brouille avec ses alliés rwandais et ougandais. Le pays entre dans une zone de turbulence qui dure une éternité. L’Est est devenu la proie des prédateurs internationaux. Ce désordre organisé a coûté la vie à plus de 6 millions de Congolais.  La RDC est depuis devenue la risée de ses voisins. Le pays connaît des rébellions à répétition. Le viol y est devenu une arme de guerre. S’il y a eu agression, on parle aujourd’hui de balkanisation. Mobutu n’avait-il pas dit qu’après lui ce sera le déluge ? L’entrée de l’AFDL n’était pas le début de la véritable libération attendue mais un mirage qui a noyé l’espérance du peuple congolais. Ce simulacre de libération s’est vite transformé en une occupation rwando-ougandaise qui ne dit pas son nom.

2018 : Une bombe nommée ″Ekofo″

Avec sa voix fluette, le cardinal Monsengwo est jusque-là le seul homme qui ne cesse de rabrouer le pourvoir dictatorial. Il va jusqu’à qualifier les gouvernants de ″médiocres″. L’Eglise  protestante dirigée à l’époque par Mgr Marini est une alliée de la dictature honnie par le peuple. Mais l’arrivée à sa tête du docteur André Bokundoa change la donne. Ayant fui l’Eglise catholique trop critique à ses yeux, le pouvoir se tourne vers l’ECC pour le culte relatif à la commémoration  de l’assassinat de Laurent-Désiré Kabila. Le gratin politique se retrouve pour cette fin dans la cathédrale du Centenaire.  L’événement est retransmis en direct à la radio et à la télévision. Erreur fatale car cet après-midi-là et alors qu’elle ne s’y attend pas, la kabilie avale des  couleuvres. Le révérend-pasteur Jean-François Ekofo, l’orateur du jour, du haut de sa chaire surprend les Congolais. Sans discontinuer, il crache pendant de longues minutes des vérités crues qui bousculent le régime dans ses fondements. Le sermon du révérend est une véritable bombe. Aussitôt le culte terminé, le pouvoir décide de lui faire payer son audace. Le pasteur reçoit des menaces de mort pour avoir osé. Il doit sauver sa peau pour échapper à la colère des kabilistes. Il ne trouve le salut qu’auprès de la Monusco. L’Amérique va lui octroyer difficilement un visa afin qu’il y rejoigne ses enfants. Il quitte le pays dans la plus grande discrétion. Débute alors l’exil forcé du héros du 16 janvier 2018.

2018 : Nul n’est prophète chez lui

Celui qui devrait en réalité être considéré comme l’honneur de la nation  pour avoir inscrit le nom de son pays dans le cercle fermé des Nobel, est au contraire devenu un ennemi à abattre. Denis Mukwege n’est pas aimé dans le cercle du pouvoir au Congo parce que son combat dérange. Depuis qu’il a reçu son Nobel, aucun président ne l’a félicité pour ce prix, personne ne l’a reçu officiellement. Félix Tshisekedi ne lui a accordé une audience que pour des raisons de politique politicienne. Pourtant, le docteur Mukwege cumule les prix. Il en compte une bonne vingtaine dont le Nobel de la paix et le prix Sakharov. Mieux que beaucoup de Congolais, il a obtenu plusieurs distinctions universitaires car étant docteur honoris causa d’une douzaine d’universités.  Si en 2009 le journal nigérian Daily Trust l’a élu « Africain de l’année 2008 » pour saluer son combat, le magazine Fortune l’a placé 35e personnalité la plus influente en 2015. Le rappeur français Médine lui dédie la chanson « L’homme qui répare les femmes » dans son album « Prose Élite » sorti en 2017, chanson dans laquelle Youssoupha a prêté sa voix. Ni la mort, ni les intimidations, ni les menaces ne semblent freiner son élan. L’homme est pressé. Il veut à tout prix que justice soit rendue pour les atrocités commises dans la partie est du Congo et que les recommandations du Rapport Mapping qui dérangent les autorités rwando-ougandaises et leurs alliés congolais soient mises en œuvre.

2019: Les poches d’abord

Après 37 ans d’opposition, L’UDPS accède au pouvoir de la manière que l’on sait. Mais vite le slogan du parti se transforme en une devise creuse dépourvue de sens. Le Congo stagne, ne décolle pas, s’enfonce de plus en plus dans le désespoir et la misère. Le nouveau pouvoir s’engage dans des projets trompe-l’œil qui sont des échecs patents (Cent jours, Tshilejelu, gratuité de l’enseignement, Trans-Academia, grand marché de Kinshasa etc.). Des millions sont détournés par les proches du président dans une impunité totale, alors que le peuple manque de tout. Le tribalisme atteint des sommets. Avec sa justice à deux vitesses, la corruption, le népotisme, le culte de la personnalité, l’exploitation de l’homme par l’homme avec le RAM, les promesses non tenues, l’enrichissement personnel, l’affairisme des dirigeants, des parodies de procès, le musèlement de la presse, les calculs électoralistes, les dépassements budgétaires à la présidence de la République, des frontières poreuses, l’UDPS au pouvoir n’est différent ni du MPR ni encore moins du PPRD dont elle reproduit les vilaines méthodes de gouvernement. Sa vraie dynamique repose sur une seule logique : les poches d’abord. Les hommes du pouvoir se servent, s’enrichissent au détriment du peuple qui manque de tout car manger est un luxe. Le Congo est devenu une poubelle à ciel ouvert où tout le monde vient fouiller. Le Rwanda, l’Ouganda, le Burundi, la Chine, l’Occident et ses multinationales pillent nos ressources naturelles. L’état de délabrement avancé dans lequel se trouve le pays étale l’incompétence, l’insouciance  et l’amateurisme des gouvernants. Aujourd’hui, la RDC n’est ni une nation ni un État, Elle ressemble à un navire sans capitaine qui vogue désespérément dans une mer agitée vers une destination inconnue mettant ainsi tous les passagers dans un fol émoi. Les flots violents vont-ils l’engloutir ?

Samuel Malonga/mbokamosika.com

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