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Culture et arts:l’apport étymologique et sémantique de certains lexemes par kat nawej.

Illustration commémorative de Chibinda Ilunga

Provenant d’un atelier de la Région Chokwe en Angola d’avant 1850.

Un cadeau du Musée Rietberg Zürich

Photo : Rainer Wolfsberger
 

De prime abord, nous félicitons nos frères qui fournissent des efforts énormes à nous procurer ce genre de travaux. Estimant que nos langues sont un patrimoine culturel national plutôt qu’une chasse gardée d’un certain groupe, chaque fois que l’occasion se présente, nous faisons l’effort d’apporter aux autres notre modeste contribution. Qu’il plaise à l’auteur et aux lecteurs d’apprécier notre apport étymologique et sémantique de certains lexèmes abordés par notre frère Augustin Odimba. Nulle prétention de détenir l’exclusive vertu, vos corrections et ajouts sont les biens venus.

D’emblée de jeux, nous disons que la langue Otetela est parlée par une composante des peuples regroupés dans la famille Anamoongo. Ce faisant l’Otetela est une composante de langues bantoues. Par conséquent, l’Otetela partage une grande portion de son lexique ses langues sœurs de la région. Nous croiserons là c’est possible ses liens de proximité et de similitude.

Selon Mr Odimba, Tshopa signifie bouteille est Olondo et Olangi sont ses synonymes en Otetela.
Nous ajoutons qu’il est important de noter que le terme tshopa ou tshupa est relié au terme swahili chupa portant une phonie et une signification identiques : bouteille. Qu’est-ce qu’une bouteille ? C’est un vase, un réservoir, récipient, bref un contenant qui sert à conserver un liquide quelconque : eau, huile, alcool, pétrole, etc.

Il n’est pas surprenant de répertorier cette similarité étant donné notre historie. Les swahilis pénétrèrent le territoire des Atetela. L’influence linguistique des uns sur les autres s’exerça dans les deux directions. Nous ne pouvons dire avec certitude de quelle langue provient ce mot. L’évidence est que les émigrants qui débarquèrent dans la cote indienne, apportèrent leurs lexiques qui furent incorporées aux langues qui y existaient. L’inverse est aussi vrai, les vocabulaires venus d’ailleurs furent été intégrés dans nos langues locales.

Par ailleurs, nous retrouvons ce terme tshopa ou tshupa en Kikongo et Lingala. Il se présente sous la forme ntuba ou ntshuba, nom provenant du verbe ku tuba ou ku tshuba qui signifie perforer, poignarder, crever, etc. A la similitude phonique se joint celle de la signification identique. Une bouteille contient pour l’essentiel un espace creux, un vide, etc. Il fait donc, un corps perforé, rongé, troué, etc.

De surcroit, tshopa ou tshupa se rapporte au terme français « tube » signifiant tuyau de petit diamètre, Canal, conduit ou emballage de forme cylindrique . Ce qui ne doit pas nous étonner parce le terme tube provient du Latin : tubus {tub(o)-, tube, tubule}, tuyau cylindrique .

Le synonyme Tetela du terme tshopa/tshupa est olondo dont la signification identique est : une bouteille. Le terme olondo est répertorié dans nombre de nos langues bantoues de la région dont le Luba et Ruund sous la forme mulondo portant une signification identique vase et tuyau. En Luba du Kasaï : mulòndò(ù) signifie une gargoulette, une bouteille. Ce terme a pour synonyme mùlàngì. Dans son deuxième sens, il dénote une cruche ou un vase. En Luba Katanga : mulondo au pluriel milondo désigne une bouteille ou des bouteilles, cruche, vase, tuyau. En Ruund, le terme mulond pour une signification identique à celle susmentionnée. Le nom propre de personnes : Molondo est bel et bien Tetela. Par extension, le terme mulondo s’applique à un canal et un détroit.

L’autre synonyme du mot tshopa, en Tetela même, est Olangi (une bouteille d’eau) la similitude avec le terme Lingala, Luba et Kikongo molangi est apparente qu’il faille se demander s’il ne s’agit pas d’un emprunt de ce terme en Otetela. Ce qui nous importe est de nous procurer l’étymologie bantu du terme Olangi ou Mulangi à la signification identique : un contenant, un réservoir, un récipient ou une éprouvette. La seule trace du mot mulangi que nous retrouvons en Lingala est la référence à une boisson alcoolique : molangwa, molangwi qui devient molangi. Au pluriel, il se note milangi. Dans sa forme courte, le terme langi fait surtout référence à la peinture.

C’est en Kikongo que nous retrouvons le mot nlangi (mlangi) qui dénote une personne qui accompagne quelqu’un ou un objet qui soutient un autre. Si nous concédons qu’un récipient soutient son contenu, il est plausible que l’origine de molangi en soit là. Il est à noter que lingala comme langua-franca contient un nombre important du lexique Koongo suite à l’apport de ces initiateurs dont nombreux furent originaire de cet espace linguistique- guides ou porteurs de blancs colonisateurs. Sinon il nous faut chercher ailleurs.

Le terme Dumbu (Dombo ou Djoma )
Dans l’espace linguistique Lingalaphone il est evident que le terme muwumbu signifie en francais esclave. Un esclave est un individu qui a perdu sa liberte. Les idioms tels que etre dans un cage, etre pris dans un piege, etre enfermee dans une chambre ou dans une boite, encerclement, confinement, emprisonnement, etre entouree, decrivent les conditions d’un esclave. an ensnared, an entombed, an enclosed and a surrounded individual are used.

Cependant dans l’espace Swahiliphone, l’immutabilité de relations est dénotée dans le proverbe, le traversier peut disparaitre mais le lieu de traverse demeure. Le traversier ou le canoé est appelé “mutumbu” tandis que le lieu est “kivuko”. Un canoé est en effet une boite en bois dans lequel on a fait un creux, un espace ou s’assoient les gens. En quelque sorte c’est une boite, une chambre, un confinement, un cercueil, ou un sarcophage. Le terme français tombe ou tombeau parait d’emblée comme étranger, ce faisant n’a rien de similaire avec nos langues. Une courte réflexion nous révèle la similitude à nos langues. Il en est de même de son équivalent Anglais tomb lieu d’enterrement ou d’inhumation d’un corps humain. Une tombe est un lieu, un espace, un creux, une chambre souterraine ou l’on entrepose pose les restes humains. La similitude phonique et la signification de ces lexèmes devient apparente. Une tombe comme terme français, a tomb comme terme Anglais et wumbu de nos diverses langues bantoues dénotes une chose identique, a défaut similaire si l’on tient compte des usagers. ”. Le mot Anglais womb appartient à cette même famille de mots. Les anglais appellent l’endroit à l’intérieur du ventre d’une femme où se développe un bébé. L’utérus ressemble à une cage, à un cercueil, à une boîte, à une tombe, à un confinement, à une clôture, à une pièce ou à un compartiment. Le bébé dans le ventre d’une mère est asservi, emprisonné, clôturé, enterré, confiné, placé et entouré par le corps de sa mère. Si la similitude avec les langues étrangères est bien évidente, a combien plus forte raison l’est-elle dans des langues bantoues. A fortiori celle d’une même région, partageant une histoire et une géographie commune.

La similitude de ces lexèmes et le terme central sur lequel ils sont construits est évidente. Indépendamment de la langue que nous utilisons, le phonique identique de « umb » ou « omb » résonne sans équivoque. Nous pouvons extraire de tous ces mots le son du mot racine « umb » -muw-umb-u, mut-umb-u, t-omb-e (tombe), womb (t-umb-u). Dans de nombreuses langues bantoues, dont les langues occidentales ont pu naître, le mot racine «umb» implique la production, le développement, la fabrication, la création ou la fabrication de quelque chose. En outre, le lexème « umb » signifie transformer l’argile en un objet utile. Le créateur porte le nom de muwumbaji alors que la créature (créée) est appelée muwumbi-le nom donné à l’ancêtre de l’humanité dans la langue Gikuyu du Kenya, Afrique de l’Est. Ce sens commun est d’une manière ou d’une autre incorporé dans les termes ci-dessus, indépendamment des langues

Il ressort de ce qui précède, le sens étymologique et sémantique du terme Otetela Dumbu signifiant tombe soit conforme à son usage dans toutes les langues bantoues. La différence entre le parler de Lubefu et celui de Lodja quant au terme Dombo signifiant tombe vient d’être aussi évoque en ci-dessus. La même logique s’applique au terme Djoma signifiant cimetière C’est comme qui dirait wumbu et wumba.

Le terme Ofonya
Ofanya semble corroborer le verbe swahili fanya (ku) signifiant faire, construire, monter, inventer, etc. Si tel en est le cas, les idiomes Efonya fony’akambo signifieraient des histoires (affaires, conflits) Inventées, ou montées de toutes pièces ou raconter des mensonges ; Papa Shuku eko efony’akambo signifiant Papa Shuku est un inventeur, monteur, fabricateur des mensonges (des histoires mensongères), et We fanyiyaka dia mvula ayolo elo? Pensez-vous qu’il se forme, qu’il se constitue, etc. une pluie dans le ciel ? Un Efony’akambo signifierait dans ce cas un menteur c’est-à-dire un monteur, un faiseur, un fabricant des histoires mensongères. Il est à noter la récurrence du mot akambo qui est répertorié dans nombre de langue bantoues. Dans sa forme péjorative, telle que cela est le cas ici, il dénote des conflits, des litiges, de mésententes, des différends, etc. Le verbe kokamba d’où provient des noms tels que mokambi, lokamba, etc. dénote le faire de diriger un groupe.

Préfixe « Ta »
On retrouve l’équivalent de « ta » de Atetela sous la forme « Sa » ou Sha » chez les Luba et Ruund. Les noms Shambuyi, Shawumba, Sakatenda, Sakombi, Sayilunga en sont quelques exemples. Pour certains, sha (sa) a pour féminin « na ». Les noms qui portent les préfixes, non seulement désignent-ils un premier nés, encore faut-il qu’ils soient des garçons. L’évidence du terme woso dans les autres langues de la région est bien évidente : nyoso et banso de lingala, yonso et bonso de kikongo, awonsu du Ruund, onsu, wonsu et wonsu de Luba du Kasaï et onso, wonso, wionso de Luba Katanga, pour n’en citer que ceux-là. Ils dénotent les adjectifs et pronoms tout-toute/tous-toutes.
Le nom Omba vient du verbe « omba » qui signifie dans certaines langues bantoues pondre. Le terme « Tetela » est lui-même un synonyme du terme Omba car signifiant éclore en premier, précéder, devancer. Est éclos, ce qui a été pondu au préalable : un œuf. Chez les ovovivipares, l’éclosion est à l’intérieur du ventre de sa mère.

Le premier né de jumeaux porte le nom de Omba, selon le concept qui veut que le second né, soit nommé shako à cause de son retard ou son refus de naitre le plus tôt. Isha veut dire demeurer. En langues sémitiques (arabe et hébreu) Ish est le nom d’Adam et Isha c’est le nom d’Eve. S’il faut déduire du nom d’Eve signifiant la mère de tous les vivants, Ish est la vie. Le verbe demeurer se dit aussi kaa ou kala en swahili, kala en kikongo et Luba du Katanga, zala (sala ou shala) en lingala. Tikala en lingala signifie demeurer ou rester, trainer, être en arrière. Shala en Luba du Kasaï veut dire autant. Les Bangu-bangu et leurs associes nomment le premier né de jumeaux Kabala et le second Kibundila. Kabala signifie l’éclore, l’émergeant, le sorti, tandis que Kibundila ou Kabund chez certain est celui qui se cache, trainer, retarde sa sortie.

Somme toute, derrière chaque terme d’une langue bantoue se trouve un concept bien ficelé, clair et logique qui dépasse les limites du seul parler local. C’est un maillon qui nous accroche aux autres. Parfois, il s’étend à des horizons lointains, pour autant que nous soyons capables d’en dénicher les morceaux qui persistent encore. Nous sommes l’ancêtre de l’humanité. A la preuve de fossiles s’ajoutent celles de nos langues pour l’affirmer haut et fort. Si seulement nous pouvons le découvrir nous-mêmes afin de le partager avec ceux qui nous accusent de manquer d’histoire. Ils s’apercevront, qu’ils scieraient la branche vestige sur laquelle repose leur nanti science et technologie. Nous complèterions le vide de jonction de l’histoire universelle de l’humanité. Pourtant notre jeunesse s’éloigne de ce patrimoine oral que nous ont légué nos ancêtres. Ils lisent peu. Mon peuple, ne périra-t-il pas à cause de manque de connaissance ? Cette connaissance de la vérité qui devait nous affranchir.

Kat Nawej/Mbokamosika

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