Chronique de CLBB : Quand les USA transforment les djihadistes en alliés – La tragédie syrienne et le jeu dangereux des grandes puissances

 

Le Proche-Orient, région à la fois stratégique et instable, est depuis longtemps le théâtre des ambitions des grandes puissances. Parmi ces conflits, la guerre en Syrie incarne une tragédie humaine et géopolitique dont les acteurs majeurs ont façonné les dynamiques au gré de leurs intérêts. Dans cette toile complexe, le rôle des États-Unis, notamment leur stratégie controversée de soutien indirect à certains groupes djihadistes pour renverser Bachar el-Assad, mérite une analyse approfondie.

 

Une stratégie risquée : l’ennemi d’hier comme allié d’aujourd’hui

 

Depuis le début de la guerre civile syrienne en 2011, les États-Unis ont cherché à affaiblir le régime de Bachar el-Assad, perçu comme un obstacle à leurs intérêts géopolitiques au Moyen-Orient. Cependant, faute d’une opposition modérée suffisamment organisée et armée, Washington s’est retrouvé à financer ou à armer indirectement des groupes rebelles, parmi lesquels figuraient des factions djihadistes.

 

Des rapports indiquent que des armes fournies par les États-Unis à certains groupes « modérés » ont rapidement été détournées par des organisations affiliées à Al-Qaïda ou à Daech. Ce soutien, même indirect, soulève une question fondamentale : peut-on justifier des alliances temporaires avec des idéologies extrémistes pour atteindre des objectifs géopolitiques ?

 

Une Syrie « irakisée » : le chaos comme héritage

 

L’objectif de faire tomber Bachar el-Assad s’est heurté à des réalités complexes. Le régime syrien, soutenu par la Russie et l’Iran, a résisté, tandis que le soutien américain aux groupes rebelles a contribué à fragmenter davantage le pays. Ce qui s’en est suivi est une « irakanisation » de la Syrie :

 

Territoires morcelés : Des zones entières sont passées sous le contrôle de groupes armés rivaux.

 

Populations déplacées : Des millions de Syriens ont été contraints de fuir leurs maisons, créant une crise humanitaire sans précédent.

 

Radicalisation accrue : Les factions djihadistes ont prospéré, transformant la Syrie en un terreau fertile pour l’extrémisme islamiste.

 

Le parallèle avec l’Irak est frappant. En 2003, l’intervention américaine pour renverser Saddam Hussein avait conduit à une fragmentation du pays, avec la montée en puissance de groupes comme Daech. En Syrie, les erreurs semblent se répéter, avec des conséquences encore plus dévastatrices.

 

Les contradictions américaines

La politique américaine en Syrie met en lumière des contradictions majeures :

 

1. Un double discours sur le terrorisme : Tandis que les États-Unis déclarent la guerre au terrorisme, leur soutien à des groupes rebelles proches d’Al-Qaïda montre une flexibilité opportuniste qui fragilise leur crédibilité.

 

2. Une absence de vision à long terme : Renverser Assad sans plan clair pour la transition a laissé un vide que les djihadistes ont exploité.

 

3. Des alliances problématiques : En collaborant indirectement avec des factions extrémistes, Washington a contribué à aggraver le chaos qu’il prétend combattre.

Les leçons à tirer

La tragédie syrienne nous enseigne plusieurs leçons importantes :

 

Les alliances de circonstance ont un prix : Collaborer avec des groupes extrémistes peut produire des gains à court terme, mais entraîne des conséquences à long terme souvent incontrôlables.

Les solutions militaires ne suffisent pas : Renverser un régime sans plan de reconstruction politique et économique ne fait qu’ajouter au chaos.

Le respect de la souveraineté nationale est crucial : Toute intervention étrangère qui néglige les dynamiques internes d’un pays finit par exacerber les divisions.

Une guerre sans fin

Aujourd’hui, la Syrie reste un champ de ruines, et son peuple continue de souffrir. Les grandes puissances, en poursuivant leurs intérêts géopolitiques, ont transformé un conflit interne en une guerre internationale. La stratégie américaine de convertir des ennemis en alliés temporaires s’inscrit dans cette logique cynique où les populations locales paient le prix fort.

La question demeure : ces puissances accepteront-elles un jour de privilégier la paix et la stabilité plutôt que leurs propres ambitions ? Si la Syrie est devenue un exemple de ce qu’il ne faut pas faire, le monde doit en tirer des leçons pour éviter de répéter ce scénario ailleurs.

 

CLBB – Réflexion sur les tragédies d’un monde en quête de sens

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