C’est un coup de tonnerre qui a secoué la scène diplomatique d’Afrique centrale ce 7 juin à Malabo : le Rwanda, en retrait stratégique ou en fuite symbolique, a officiellement claqué la porte de la Communauté Économique des États de l’Afrique Centrale (CEEAC). En ligne de mire : son échec cuisant à prendre la présidence tournante de l’organisation régionale, bloqué net par une République démocratique du Congo de plus en plus affirmée, méthodique et intransigeante.
Depuis Kinshasa, l’ambiance est à la victoire. La capitale congolaise savoure une série de percées internationales qui contrastent avec l’isolement croissant de Kigali. Car pendant que le régime de Paul Kagame s’épuise à justifier l’injustifiable l’appui militaire au M23, les incursions de troupes dans le Kivu, les crimes documentés à l’Est, la RDC, elle, grimpe les échelons de la diplomatie continentale et mondiale.
Une présidence contestée, une retraite humiliante
À l’origine du bras de fer : la volonté du Rwanda de présider pendant un an la CEEAC, dans le cadre du système de présidence tournante. Mais pour Kinshasa, il était impensable de voir un pays accusé de soutenir une rébellion active sur son territoire prendre les rênes d’une organisation censée promouvoir la paix et la coopération régionale. Dès lors, la diplomatie congolaise s’est mise en branle, bataillant auprès des États membres et de la Commission de la CEEAC. Avec des arguments simples, mais puissants : comment confier les clés de la maison à l’incendiaire ?
Face aux atrocités commises par les forces pro-rwandaises dans les provinces de l’Est Ituri, Nord-Kivu, Sud-Kivu Kinshasa a fourni des rapports, organisé des consultations, mobilisé ses alliances. Résultat : au sommet de Malabo, la demande rwandaise a été sèchement recalée. La Guinée équatoriale, en fin de mandat, a été reconduite. Et Kigali, humilié, a choisi le retrait pur et simple, accusant Kinshasa de manœuvres politiques. Une version qui n’a convaincu personne, sinon ceux qui refusent de voir l’évidence.
La diplomatie congolaise, nouvelle arme fatale
« Nous avons compris que la parole peut frapper plus fort qu’un obus », confie un diplomate congolais, visiblement satisfait du tournant pris par les événements. Car cette victoire régionale ne vient pas seule : le 6 juin, la RDC a été élue à la vice-présidence de la 79ᵉ Assemblée générale des Nations Unies. Et pour couronner le tout, Kinshasa a décroché un siège non permanent au Conseil de sécurité pour la période 2026-2027. Des victoires qui résonnent comme une revanche pour un pays longtemps considéré comme spectateur de sa propre tragédie.
À travers ces succès, c’est une stratégie de long cours qui porte ses fruits : celle du président Félix Tshisekedi et de son gouvernement, qui ont misé sur la constance, la documentation rigoureuse des crimes, le lobbying patient, et un réarmement moral d’un État longtemps perçu comme faible.
Le Rwanda sur la défensive, la façade se fissure
Pendant ce temps, à Kigali, le discours d’un régime « victime de désinformation » s’effondre sous le poids des sanctions, des critiques et des ruptures d’alliance. Les États-Unis, l’Union européenne, la Belgique, plusieurs chancelleries africaines : tous ont envoyé des signaux de désapprobation, suspendant aides et coopérations militaires.
Le Rwanda, hier maître du jeu dans plusieurs instances africaines, se voit désormais bousculé, marginalisé, sur la défensive. La méthode Kagame, mélange de contrôle narratif et d’activisme militaro-diplomatique, semble atteindre ses limites face à une RDC qui, enfin, reprend le contrôle de son récit.
Une dynamique à entretenir, un cap à tenir
Mais Kinshasa ne crie pas victoire trop tôt. Si l’heure est à la satisfaction, l’équipe diplomatique congolaise garde en ligne de mire les prochains défis : sécurisation des avancées obtenues, poursuite du plaidoyer contre l’impunité, amplification des alliances stratégiques sur les plans économique et militaire.
« Le Rwanda ne part pas de la CEEAC par principe. Il part parce qu’il ne peut plus gagner. Et cela, c’est une victoire des idées, de la rigueur, de la stratégie », affirme un sécurocrate à la Présidence.
Dans un continent où les rapports de force se jouent autant dans les salons feutrés que sur les lignes de front, la RDC démontre qu’elle sait désormais manier les deux registres. Et dans cette guerre d’usure diplomatique, Kigali découvre peut-être pour la première fois que Kinshasa n’est plus le même.
la RDC reprend la main
En diplomatie, il n’y a pas de hasard, seulement des rapports de force. Et dans ce duel à distance entre deux capitales rivales, les signaux sont clairs : Kinshasa avance, Kigali recule. La RDC impose son tempo, ses preuves, son langage. Elle ne réclame plus seulement justice : elle agit pour l’obtenir. Une nouvelle ère s’ouvre, faite de constance, de calculs, mais surtout de résultats. Car la victoire la plus durable est celle qui s’écrit à la table des grandes décisions.
Glad NGANGA