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L’ÉGLISE DANS LA CONJONCTURE POLITIQUE: POUR QUOI FAIRE?

(Tribune de Musene Santini Be-Lasayon)

Il est bibliquement établi que Dieu est l’Instituteur de l’ordre de l’Etat et que Jésus, les Juges, les Prophètes et les Apôtres interviennent naturellement dans le domaine politique par certains de leurs discours et actes. Mais, pourquoi alors leur Eglise établie en RD-Congo doit-elle, en tant que paroisse de la rédemption, lieu de l’espérance et détentrice attitrée de la politique de Dieu, ignorer les cris, les pleurs et les lamentations de ces enfants, de ces femmes et de ces hommes qui retentissent, non seulement dans son entourage, mais aussi et surtout en son sein même ?

Soucieuses de contribuer efficacement à la réinstauration d’une paix juste et durable en RD-Congo et dans la Région des Grands Lacs africains, la Conférence Episcopale Nationale du Congo (CENCO), catholique, et l’Eglise du Christ au Congo (ECC), protestante, ont décidé de s’impliquer activement dans la conjoncture politique nationale et régionale. Celle-ci est dominée par une grave et profonde crise multidimensionnelle et multiforme engendrée par la guerre mercantiliste qui sévit dans l’Est de la RDC depuis trois décennies. Ainsi, dotées du tranchant de la consécration chrétienne totale, la CENCO et l’ECC projettent d’organiser un dialogue national qui aboutira à l’établissement d’un «Pacte Social pour la Paix et le Bien-vivre ensemble en RDC et dans la Région des Grands Lacs.» C’est dans ce but ultime que leurs représentants respectifs ont entrepris des consultations avec les différentes parties prenantes, principalement les leaders politiques congolais du pouvoir et de l’opposition dont certains se trouvent en exil, et de la région des Grands Lacs, y compris le sulfureux président Paul Kagame du Rwanda et ses supplétifs du M-23 et d’AFC.

Malgré les agitations observées, l’idée de ce dialogue national initié par les deux plus grandes Eglises du pays remporte l’adhésion de la majorité des parties prenantes. Sauf celle des fanatiques, des extrémistes et autres caciques de l’Union Sacrée de la Nation (USN) en général et de l’UDPS en particulier. Ceux-ci trouvent que les Eglises catholique et protestante n’ont pas la légitimité requise pour prendre une telle initiative politique. Ils les accusent de se mêler du domaine politique qui ne les concernerait pas du tout, de servir de porte-voix de l’ennemi et de défendre ce dernier contre ses victimes. Ils qualifient même, sans pudeur, leurs pasteurs de « politiciens en robe.» Ils ne considèrent leur initiative que comme une légitimation de ces mouvements terroristes et criminels qui écrasent, tuent et massacrent les Congolais depuis trois décennies.

D’où, cet article destiné à distinguer le faux du vrai dans ce discours afin d’éclairer la lanterne de tous. Cependant, à partir d’ici, nous ne parlerons plus de l’Eglise qu’au singulier pour souligner, malgré quelques nuances, l’unité spirituelle des différentes branches de la Sainte Eglise universelle établies en RDC face à la crise multidimensionnelle et multiforme qui frappe la RD-Congo de plein fouet.

LE FOND DU PROBLEME 

Ceux qui reprochent à l’Eglise de se mêler de politique confrontent son comportement sociopolitique à une réponse, demeurée célèbre, de son fondateur et chef suprême, Jésus-Christ, aux disciples des Pharisiens associés aux Hérodiens. Ceux-ci l’interrogeaient, en effet, au sujet de l’impôt payé à l’empereur de Rome par les Israélites. Cette réponse mémorable de Jésus à ses contradicteurs est : « Rendez donc à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu » (Matthieu 22 :21). César représente, ici, le pouvoir temporel et Dieu, le pouvoir spirituel. Croyant que Jésus sépare ainsi ces deux pouvoirs qui n’auraient rien en commun, nombre de politiques s’indignent de voir l’Eglise s’immiscer dans le domaine politique qui lui serait étranger. Et pourtant, à travers sa réponse à ses contradicteurs, le Seigneur de l’Univers n’interdit pas à son Eglise et à ses pasteurs de se mêler de politique. Il n’empêche pas, non plus, les politiques, qui appartiennent essentiellement au christianisme en RD-Congo, de s’intéresser également aux affaires de l’Eglise. Dans le fond, Jésus rappelle plutôt aux uns et autres leur devoir de respect et d’obéissance à l’égard et des autorités temporelles et des autorités spirituelles. Il ne sépare donc pas l’Eglise de l’Etat. C’est plutôt l’homme, l’infidèle, qui se trouve à la base de ce changement intervenu dans l’histoire de la révélation où Dieu est sa seule autorité.

Depuis lors, l’Eglise et l’Etat restent chacun à sa place. Mais, ces deux ordres sont bibliquement appelés à collaborer en tant que serviteurs de Dieu. Deux raisons capitales justifient cette coopération du sommet à la base. Primo, Dieu a fait de l’Eglise le domaine supérieur et mis à part par rapport à l’Etat. C’est pourquoi, tout pays Lui appartenant en propre, celui à qui Il a confié sa gestion a nécessairement besoin de l’accompagnement de l’ordre du Royaume, l’Eglise, dont l’origine est sainte, car divine, et qui fonctionne à un niveau moral élevé. C’est la raison fondamentale pour laquelle les rois fidèles de l’histoire judéo-chrétienne, tels que David et Salomon, se reconnaissant faibles par eux-mêmes, ont toujours à leurs côtés un prophète pour les aider à mieux exprimer la volonté du Très-Haut pour son Peuple. Secundo, le domaine politique est indissolublement lié au domaine ecclésial par une soumission commune à la Seigneurie de Jésus. C’est-à-dire, à l’autorité de ce même Jésus dont l’Eglise est la représentante attitrée sur la terre. C’est ainsi que les dirigeants du monde gagnés par le christianisme, même si certains d’entre eux empruntent des voies tortueuses, sont profondément conscients et reconnaissent que Jésus n’est pas seulement le Seigneur de l’Eglise, mais également le Seigneur des Etats provisoirement placés sous leur autorité. Sinon, ils ne laisseraient pas à l’Eglise les très importantes et lourdes responsabilités d’organiser et de tenir des services cultuels, scolaires, universitaires, sanitaires, agricoles, etc, instruments par excellence de grande influence, à l’intention des populations des mêmes Etats qu’ils conduisent. Mais, d’où vient l’ordre de l’Etat ou l’ordre politique et à quoi est-il destiné ?

INSTITUTEUR DE L’ORDRE POLITIQUE

Selon Romains 13 : 1-7, toutes les autorités qui exercent le pouvoir sont instituées de Dieu. Car, c’est Lui, et Lui seul, qui a accordé aux hommes l’ordre de l’Etat ou l’ordre politique incarné par le Royaume d’Israël qu’Il a autorisé à s’établir à travers 1 Samuel 8 : 1-22 et 10 : 1-27. Ces passages bibliques et leurs suites indiquent nettement que Dieu a créé l’ordre du Royaume, l’Eglise, mais Il n’a pas créé l’ordre politique, l’Etat. Il a tout simplement accepté d’établir, avec beaucoup de regrets, ce second ordre à la suite des comportements humains malheureux de l’histoire de la révélation. Il s’agit, notamment, des réclamations expresses et insistantes des enfants d’Israël à Dieu d’un roi sorti de leurs propres rangs. Comme c’est le cas chez tous les peuples de leur voisinage. D’où, selon les prescriptions du Souverain suprême, Saül est désigné premier roi d’Israël. C’est-à-dire, la première autorité politique humaine de l’histoire judéo-chrétienne. Et ce, au moyen du tirage au sort, autrement dit de l’élection, que conduit le prophète Samuel devant les Israélites assemblés. Ce même prophète oint, par ailleurs, ce premier roi. Il dirige, enfin, son intronisation devant les Israélites rendus ses sujets.

L’ordre de l’Etat ou l’ordre politique découle donc du refus, par les hommes, de la théocratie tous azimuts. D’où, de par son origine pécheresse, car issue de la volonté humaine et non divine, « cet ordre fonctionne selon un ordre éthique sous-chrétien », à en croire John H. Redekop, théologien et politologue canadien. Car, l’ordre politique est ce domaine où les hommes plus imprégnés de l’esprit satanique que de l’esprit divin se permettent tous les coups. Il est, en clair, un mélange de la vérité et du mensonge, de la justice et de l’injustice, de la bienveillance et de la méchanceté, du bien et du mal, etc. Mais, son fonctionnement approprié, qui démontre son caractère « d’Etat juste qui est l’Etat voulu par Dieu », est un mandat divin, promu et défendu notamment par Karl Barth, le célèbre théologien politique suisse. Mandat divin dans ce sens qu’en instituant cette puissance d’ordre, Dieu a spécifiquement visé la protection de l’homme contre le risque de chaos inhérent à sa propre rébellion à l’endroit de son Créateur. L’ordre de l’Etat est donc l’instrument de la grâce de Dieu en faveur de l’homme. Mais, cette grâce est conditionnée par le respect des droits du roi que Dieu lui a accordés et qui est appelé à régner sur lui. C’est là la preuve, irréfutable, que Dieu est l’instituteur de l’ordre politique. Par conséquent, Il ne peut Lui-même se désintéresser de cet ordre qui est le lieu où les conditions de pérennité de l’espèce humaine, créée à son image et à sa ressemblance, sont en jeu. Du début à l’infini, Il y demeure comme le seul et l’unique Souverain suprême. D’où, son Eglise, sa prophétesse et politicienne, reste intimement attachée à ce service divin. D’où, le Bien auquel sont astreints les dirigeants politiques imprégnés de l’Esprit-de Dieu.

ENGAGEMENT SOCIO-POLITIQUE

Jésus, le fondateur et chef suprême de l’Eglise, emboîte le pas à son Père quand Il proclame, avec emphase, son pacte de gouvernement dans Luc 4 : 18-19 : «L’Esprit du Seigneur est sur moi parce qu’Il m’a oint pour annoncer une bonne nouvelle aux pauvres, Il m’a envoyé pour guérir ceux qui ont le cœur brisé, pour proclamer aux captifs la délivrance, Et aux aveugles le recouvrement de la vue, pour renvoyer libres les opprimés, pour publier une année de grâce du Seigneur. » Quand le fondateur et chef suprême de l’Eglise proclame solennellement, dans une Palestine tenue rigidement en mains par l’empereur de Rome, relayé sur le terrain par son gouverneur Ponce Pilate, le roi Hérode Antipas, le Sanhédrin, les maîtres de la loi, les chefs des prêtres, les Pharisiens et les Saducéens, qu’Il a pour vocation et mission de libérer les pauvres, les opprimés et les persécutés de leurs conditions avilissantes, Il inaugure là une série de déclarations de très haute portée politique. Il loue le Seigneur du ciel et de la terre, par exemple, d’avoir révélé aux plus petits, tels que les pêcheurs et les collecteurs d’impôts, ce qu’Il a caché aux plus grands, comme les rois et les présidents de la République. Il qualifie le roi Hérode de renard. Il dénonce l’hypocrisie des maîtres de la loi et des Pharisiens qui ferment les portes du Royaume des cieux aux hommes, etc. Bien avant Lui, on voit des prophètes faire aussi des déclarations à caractère politique. Le prophète Nathan, par exemple, fait vivement le reproche au roi David d’avoir fait assassiner son officier Urie, le Hittite, après avoir commis l’adultère avec Batchéba, l’épouse légitime de sa victime. Le prophète Elie blâme sèchement le roi Achab d’avoir fait assassiner le pauvre cultivateur Nabot dans le but de s’emparer de sa seule et unique vigne. Le prophète Amos prêche la justice sociale contre la situation d’injustices qui prévaut sous le roi Jéroboam, etc.

Afin de réaliser sa mission de libérateur des pauvres, des opprimés et des persécutés de leurs conditions méprisables, Jésus commence par rétablir l’ordre dans le temple de Jérusalem. Au moyen de la chicotte, Il chasse du temple ceux qui y font le commerce pour le compte des gouvernants de l’époque. En agissant de la sorte, Il inaugure une série d’actes foncièrement politiques. Il s’allie, par exemple, les pêcheurs et les collecteurs d’impôts, c’est-à-dire les faibles, ceux qui ne bénéficient d’aucune considération sociale, pour l’assister dans l’accomplissement de sa mission divine. Et ce, en lieu et place des puissants comme les rois, les présidents de la République, les ministres, les généraux, etc, qu’Il écarte ainsi du groupe qu’Il constitue. Tel un homme d’Etat habitué à résoudre les tensions politiques et sociales, Il rassemble là, à en croire Michael Green, théologien et historien anglais, une communauté de ses disciples, généralement constituée d’irréconciliables sur les plan politique et social, pour édifier le Royaume de son Père. Il s’agit des Pharisiens comme Nicodème et Paul, des Hérodiens comme Nicolas Angabus, des collaborationnistes du colonisateur romain tels que les collecteurs d’impôts Matthieu et Zachée, des Zélotes extrémistes comme Simon le Zélote et peut-être aussi de Judas d’Iscariote et Pierre, et enfin, de simples patriotes comme Jean et Jacques, les fils de Zébédée. Jésus fond cet ensemble politiquement et socialement hétéroclite en une communauté profondément unie et homogène. Avec celle-ci, Il réalise des choses extraordinaires jamais accomplies par aucune des puissances politiques et sociales susmentionnées. Loin avant Lui, le prophète Samuel déjà cité conduit, devant les Israélites réunis, le tirage au sort ou le processus d’élection et celui d’intronisation de Saül en tant que premier roi d’Israël. Shadraq, Méshak et Abed-Négro appliquent la désobéissance civile en refusant d’obéir aux lois du roi Nabuchodonosor parce qu’une loi plus haute, plus importante et plus édifiante, celle de Dieu, se trouve mise en cause, etc.

Ces divers déclarations et actes de Dieu, de Jésus, des Juges, des Prophètes et des Apôtres constituent des preuves bibliques tangibles de l’engagement sociopolitique des autorités spirituelles ou de l’Eglise. Ils sont tous fondamentalement politiques pour trois raisons capitales que voici : Primo, ils concernent, au plus haut point, les rois en tant qu’autorités politiques suprêmes et l’Etat comme lieu privilégié du politique. Secundo, ils regardent l’ensemble des faits sociaux dans leurs rapports avec le pouvoir d’Etat. Tertio, enfin, ils touchent et influencent indistinctement et profondément toutes les classes sociales. D’où, ils heurtent terriblement la conscience et l’orgueil du colonisateur romain et de la nomenklatura hébraïque. D’où, ceux-ci décident de commun accord d’arrêter Jésus, le traduisent en justice, l’accusent de blasphémateur, le jugent sommairement et le condamnent à mort par crucifixion.

CONJONCTURE POLITIQUE

Nous venons de réaliser ensemble que les autorités spirituelles interviennent naturellement, de temps à autre, dans le domaine politique par certains de leurs discours et actes. Mais, pourquoi alors leur Eglise établie en RDC doit-elle, en tant que paroisse de la rédemption et lieu de l’espérance, ignorer les cris, les pleurs et les lamentations de ces enfants, de ces femmes et de ces hommes qui retentissent, non seulement dans son entourage, mais aussi et surtout en son sein même ? Si faire de la politique, c’est participer à des conflits dont l’enjeu est la puissance, puissance d’influer positivement sur l’Etat et par là-même sur toute la communauté nationale, régionale et internationale, alors l’Eglise n’offense pas son chef suprême en s’impliquant dans cette conjoncture politique caractérisée par une grave et profonde crise multidimensionnelle et multiforme engendrée par la guerre mercantiliste qui sévit durement dans l’Est de la RDC depuis trois décennies.

La conjoncture politique? C’est, en nous inspirant du sens que Martha Harnecker donne à ce terme, cette période tumultueuse et convulsive de lutte pour l’hégémonie politico-idéologique et sociale qui se déroule actuellement entre deux groupes sociaux fondamentaux aux intérêts antagoniques. Il s’agit, en l’occurrence, de la République Démocratique du Congo de Félix Antoine Tshisekedi et de la République du Rwanda de Paul Kagame, commandité par de puissantes multinationales occidentales assoiffées des minerais critiques et stratégiques congolais. Ces derniers, mis ensemble, se retranchent derrière les groupes rebelles et terroristes du M-23 et d’AFC qu’ils ont fabriqués pour déstabiliser et piller les richesses minières de la RDC. L’Eglise, paroisse de la rédemption et lieu de l’espérance, tient à prendre ses responsabilités dans cette conjoncture politique en tant que dépositaire de la politique de Dieu ou, si l’on nous permet l’expression, « politicienne de Dieu» pour faire manifester et régner la puissance infinie de Dieu.

POLITICIENNE DE DIEU

Cependant, l’ordre politique, qui ne peut laisser l’Eglise indifférente, est divisé en plusieurs pôles d’intérêts tous humains. Dans lequel de ceux-ci peut-elle alors se placer durant la conjoncture politique ? Doit-elle composer avec le pouvoir établi ou avec l’opposition à ce pouvoir ? Doit-elle, au contraire, faire du combat de la majorité silencieuse, qui aspire à l’Etat de droit et qui fait d’elle la première force sociale du pays, son propre combat ? Doit-elle plutôt n’emprunter aucune des deux précédentes voies pour demeurer au milieu du village comme le lui suggèrent certains milieux apparemment sincères et désintéressés, afin de brandir, le cas échéant, sa neutralité oisive entre les deux groupes sociaux fondamentaux aux intérêts antagoniques en lutte pour l’hégémonie politico-idéologique et sociale ? Dans tous les cas de figure possibles, l’Eglise doit se comporter conformément à la ligne politique indiquée par son chef suprême, Jésus-Christ, contenue dans Luc 4 : 18-19, appuyée par celle de l’Apôtre Paul énoncée dans Romains 13 : 1-7. Car, le christianisme est toujours affaire de lumière. Or, la politique, telle qu’elle est pratiquée par l’homme, qui ne cesse de se rebeller contre Dieu, est souvent affaire des ténèbres.

En tant que dépositaire attitrée de la politique de Dieu, l’Eglise a bel et bien un rôle à jouer dans la conjoncture politique. Lequel alors ? Entendons-nous bien. Il ne s’agit pas, pour l’Eglise, de s’adonner à la politique politicienne qui réduit les antagonismes sociaux à des conflits d’intérêts entre des partis politiques qui s’affrontent pour conquérir, exercer ou conserver le pouvoir d’Etat au profit des classes sociales qu’ils représentent. Il ne s’agit pas, non plus, pour l’Eglise, de s’emparer de toutes les institutions politiques afin de les diriger elle-même par le biais de ses meilleurs pasteurs et laïcs. Il s’agit plutôt, pour l’Eglise, de prendre part, puisqu’elle en a bibliquement le droit et le devoir, au débat relatif aux problèmes dits politiques du pays. Et ce, en vue de jouer son éminent rôle de conscience critique de la société, non seulement par les prédications à l’audience limitée de ses pasteurs, par d’honnêtes et de vigoureuses prises de position sur des questions déterminées d’intérêt général, mais aussi et surtout par l’établissement d’un « Contrat Social pour la Paix et le Bien-vivre ensemble » en faveur d’un pays en danger d’implosion tel que la RD-Congo.

Certes, dans les Etats où l’arbitraire règne, le besoin de promouvoir et de défendre une cause juste est très souvent, pour une personne physique ou morale éprise de liberté, de vérité et de justice, un appel à sa propre souffrance. Mais, la vraie Eglise de Jésus-Christ doit courageusement se lever, au nom de tous et surtout des faibles, pour prendre une position juste et durable concernant des questions cruciales d’intérêt général tels que l’insécurité récurrente sévissant dans l’Est de la RDC depuis trois décennies, le blocage du processus menant à l’instauration concrète de l’Etat de droit, l’insolente richesse sans cause et le cynique train de vie de l’infime clique qui contrôle les principaux rouages du pouvoir d’Etat par rapport à l’extrême pauvreté de l’immense majorité du Peuple. Pour se faire entendre le mieux possible et espérer obtenir les résultats escomptés, l’Eglise doit toujours veiller à se prononcer et à agir sur ce genre de problèmes pendant que certaines officines politico-idéologiques les conçoivent et surtout au moment où ils se posent avec acuité. Son objectif ici est de montrer, aussi bien aux gouvernants, aux opposants qu’au Peuple souverain le bon chemin conduisant au règne incomparable de la puissance infinie de la Liberté, de la Vérité et de la Justice de Dieu.

Et c’est justement ça la politique de Dieu dont l’Eglise est la dépositaire attitrée sur la terre. Une politique fondée sur la Justice qui élève une nation et établit l’égalité devant la loi. Une politique qui se réalise, en toutes circonstances, dans la Vérité, c’est-à-dire, dans la transparence la plus complète possible. Une politique qui promeut et défend la Liberté, c’est-à-dire, qui brise les entraves arbitraires pour favoriser l’expression populaire sur des questions d’intérêt général. Ces trois valeurs fondamentales du christianisme sont des filles de l’Agapè, attribut de Dieu et résumé du message biblique, qui génère la coexistence pacifique entre les individus, entre les communautés ou entre les Etats. Dans ce contexte, l’exercice de la coresponsabilité politique de l’Eglise consiste à rappeler à l’Etat, sans se lasser, les vrais critères de cette Justice, de cette Vérité et de cette Liberté, les vrais critères de l’Amour donc, et de l’incliner à accomplir les tâches y afférentes. Celles que contient, par exemple, le « Contrat Social pour la Paix et le Bien-vivre ensemble» que portent la CENCO et l’ECC. Voilà pourquoi l’Eglise est, non seulement la prophétesse de Dieu, mais aussi sa politicienne.

OPPOSITION PROPHETIQUE

Attestation du Très-Haut parmi les hommes, domaine supérieur et mis à part, représentante du Seigneur de l’ordre du Royaume et de l’ordre politique, guidée par le Saint-Esprit, conduite par des serviteurs dotés du tranchant de la consécration chrétienne totale et faisant fi de ses futiles querelles d’intérêts, l’Eglise, institution divino-humaine, est susceptible de distinguer le pouvoir institué de Dieu de son illusion. En effet, l’autorité instituée de Dieu selon Romains 13 : 1-7, c’est celle qui s’attache à la Vérité, qui pratique la Justice, qui favorise la Liberté responsable, qui fait le bien, qui pousse les gouvernants et les gouvernés au bien, qui se préoccupe constamment de la vie en abondance de son Peuple, etc. C’est pourquoi Dieu lui a donné le pouvoir de punir celui qui fait le mal. Dans le même ordre d’idées, lorsque la détentrice de la politique de Dieu est convaincue, preuves palpables à l’appui, que l’Etat qui l’abrite fait, à un moment donné ou à un autre de l’histoire, fausse route, elle a le droit et le devoir, selon les prescriptions du Souverain suprême indiquées dans Ezéchiel 3 :16-21 et 33 :1-9, de le prévenir afin de l’amener à changer positivement de comportement, d’attitudes et de pratiques. L’Eglise est donc habilitée à apporter son assistance à un Etat en danger ou à lui résister quand il s’écarte des principes divins de l’Etat juste.

Mais, si elle refuse de reprendre le chemin de la consécration chrétienne totale, que l’Apôtre Pierre a endurée jusqu’au sacrifice suprême devant l’opposition farouche de Rome à sa prédication, ou si elle renonce à sa mission prophétique par crainte des représailles, par coterie tribalo-régionaliste ou par opportunisme, alors la colère et la punition de Dieu s’abattraient, d’après Ezéchiel 3 :16-21 et 33 : 1-9, sur elle en lieu et place des responsables de cet état de choses. Dieu a fait d’Ezéchiel, son prophète et politicien, le guetteur d’Israël. De même, Il a fait de l’Eglise, sa prophétesse et politicienne, la guetteuse de la RDC et de la Région des Grands Lacs africains. C’est pour quoi, son message, prononcé dans les structures du péché, doit être, en tant que stricte vérité révélée, clair, franc, dur et dynamique. Car, il est destiné à provoquer la prise de conscience d’une rupture avec le comportement, les attitudes et les pratiques décriés, à arracher les racines du mal et à conduire les gouvernants et les gouvernés vers leur libération des multiples servitudes qui les enchaînent et les étreignent. Dotée du tranchant de la consécration chrétienne totale, la véritable Eglise de Jésus-Christ fait voir, en face ou à distance, leurs erreurs et fautes aux chefs du peuple et à leurs opposants qui ont agi d’après leur propre vérité ou leur propre justice. A cette occasion, elle exige d’eux, de la part de Dieu, le changement positif de comportement, d’attitudes et de pratiques. C’est exactement ce que le prophète Nathan a fait face au roi David, à travers 2 Samuel 11 : 1-24 et 12 : 1-25, relativement au complot que ce dernier avait fomenté contre son officier Urie, le Hititte. Le roi David, réceptif aux reproches de Dieu lui transmis par le prophète Nathan, a reconnu sa culpabilité, s’est repenti et a changé de comportement. C’est justement ce processus de correction et de conversion, découlant des blâmes, des reproches et des conseils préalables de l’autorité spirituelle, que les théologiens de la libération entendent par opposition prophétique. Dont l’objectif est de ramener les chefs du peuple ou leurs opposants qui ont fait fausse route sur la voie de la politique de Dieu, politique constante de la Liberté, de la Vérité et de la Justice, de l’Amour donc, qui établit ou rétablit la paix entre tous.

En s’impliquant dans cette conjoncture politique essentiellement caractérisée par une guerre mercantiliste qui endeuille le Congo depuis trois décennies, l’Eglise ne s’écarte pas du tout de la mission que Dieu lui a confiée si elle se situe sur les hauteurs d’une ferme implication fondée sur les impératifs de la Vérité qui dissipe tous les malentendus et toutes les équivoques. Elle ne s’écarte pas du tout de la mission que Dieu lui a confiée si elle se situe sur les hauteurs d’une ferme implication fondée sur les impératifs de la Justice qui élève une nation et reconnaît les mérites de chacun. Elle ne s’écarte pas du tout de la mission que Dieu lui a confiée si elle se situe sur les hauteurs d’une ferme implication fondée sur les impératifs de la Liberté qui mène à la concorde sociale. Enfin, l’Eglise ne s’écarte pas du tout de la mission lui confiée par Dieu si elle se situe sur les hauteurs d’une ferme implication fondée sur les impératifs de l’Agapè, cet amour inconditionnel et désintéressé, qui recherche le bien-vivre ensemble entre tous et le bien-être de tous, y compris celui de l’ennemi, par l’offrande de soi.

MUSENE SANTINI BE-LASAYON 

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